Les prochaines élections montreront à quel point Macri est dévoué à l'Argentine, estime Paul Antonopoulos, directeur du Centre de recherche multipolaire de Brasilia.
Inflation exorbitante, pauvreté grandissante, baisse des revenus, famine et sous-nutrition – tout cela a provoqué une vague de protestations et de confrontations en Argentine, tandis que la politique d'austérité menée par le président Mauricio Macri, prônant ouvertement des opinions libérales, continue d'éliminer toute une génération d'Argentins. Ces mesures d'austérité sont présentées sous la forme d'un plan anticrise, pour lequel le Fonds monétaire international (FMI) a alloué au pays 57 milliards de dollars.
L'Argentine traverse une véritable crise économique: à l'heure actuelle, 32% de la population vivent sous le seuil de pauvreté, et le taux de chômage atteint 10%. Cette année, l'inflation risque d'atteindre 55%, la population argentine est économiquement opprimée – ainsi le néolibéralisme se manifeste dans toute sa splendeur et continue de dominer dans ce pays latino-américain. Néanmoins, le néolibéralisme est-il la raison pour laquelle les relations traditionnellement hostiles entre l'Argentine et le Royaume-Uni ont soudainement changé de vecteur en devenant presque amicales?
L'Argentine et le Royaume-Uni étaient ennemis à cause des litiges territoriaux dans l'Antarctique et les îles Malouines, qui ont provoqué une guerre entre les deux pays en 1982. Aujourd'hui, les relations anglo-argentines s'améliorent indéniablement, et pas seulement grâce à dix ans d'amitié entre Mauricio Macri et le premier ministre britannique Boris Johnson, mais aussi parce que tous les deux sont des adeptes fidèles du dogme néolibéral.
Boris Johnson s'est rendu en visite à Buenos Aires l'an dernier, quand la ville accueillait le sommet du G20. Il a également rendu hommage aux Argentins tués dans la guerre des Malouines de 1982 devant le mémorial militaire dans le centre de Buenos Aires, qui est l'un des principaux symboles du patriotisme en Argentine.
Par rapport à d'autres questions globales, l'amélioration des relations anglo-argentines n'est certainement pas le premier point de l'agenda du gouvernement britannique. Mais les médias argentins n'ont pas manqué de rappeler à leurs compatriotes que c'est le Royaume-Uni qui avait soutenu la demande argentine d'aide financière adressée au FMI. Compte tenu de l'aspiration de Mauricio Macri à un modèle ouvert de relations économiques, une autre opportunité s'offre – rendre les relations pacifiques entre le Royaume-Uni et l'Argentine permanentes. Mais à quel prix?
Puisque le néolibéralisme sous-entend à quel point l'ingérence minimale de l'Etat dans l'économie est possible pour motiver les grandes entreprises, les multinationales se battent activement pour une place au soleil et s'efforcent d'évincer leurs rivaux du marché – les compagnies publiques, à la recherche de nouveaux marchés d'écoulement et de possibilités commerciales. Cela indique que le néolibéralisme règne en Argentine, par conséquent les revendications territoriales de l'Argentine par rapport à l'Antarctique et aux îles Malouines ne seront pas la priorité du gouvernement Macri.
Le néolibéralisme porte un double coup contre les habitants de l'Argentine: sur fond de déclarations vides sur la nécessité de répartir les revenus de manière juste entre toutes les couches de la population, c'est en réalité un "supermarché" public gonflé qui est créé et qui ne fait qu'accroître la pauvreté et le chômage, en comprimant la classe moyenne. En détournant l'attention des Argentins des affaires internationales Mauricio Macri ne fait pas le moindre effort pour clore à tout jamais le dossier de l'Antarctique et des Malouines, qui était toujours pris très à cœur par la population.
Pendant que les Argentins sont occupés à combattre la crise économique, il convient de se demander si Mauricio Macri fera le prochain pas pour régler le problème territorial mis de côté pour le moment et cherchera à passer un accord pour tenter de régler les revendications territoriales avec le Royaume-Uni. A en juger par les résultats des primaires d'août, remportées par Alberto Fernandez, principal rival de Mauricio Macri dans la course présidentielle, il est à supposer que ce dernier pourrait perdre les élections en octobre.
Les sociologues sont persuadés que les élections du 27 octobre seront remportées par Alberto Fernandez. Ricardo Rouvier & Asociados prédit que cela arrivera dès le premier tour, avec un score de 51,5% contre 34,9% pour son adversaire. Trespuntozero affirme que Fernandez gagnera avec 51,9% des voix, contre 34% pour Macri. Alors que Clivajes prédit un écart de 52,6% contre 32,5%. Néanmoins, la plupart des experts prédisaient également la victoire de Macri en août et ne s'attendaient pas à une victoire totale de Fernandez.
Du coup, il est impossible de compter entièrement sur les pronostics. Conscient de la situation, Mauricio Macri se battra encore plus activement pour sa victoire en octobre, il dans ces conditions il ne cherchera pas à s'attirer les foudres des Argentins en signant un accord avec Londres sur ses conditions. C'est pourquoi avant les élections il est peu probable que le litige sur l'Antarctique et les Malouines soit au premier plan du dialogue entre Macri et Johnson. Mais si Macri remportait la victoire, ferait-il le premier pas en trahissant les intérêts nationaux et en acceptant des concessions territoriales sur l'Antarctique et les Malouines au profit de son ami britannique?