04.06.2024
Les controverses de l'automne dernier entre Rome et Paris au sujet des migrants avaient été apaisées. Aujourd'hui la question reste tragiquement d'actualité. La Première ministre italienne, Giorgia Meloni, perd progressivement le consensus, n'ayant pas tenu les promesses souverainistes implicites dans le programme de son parti pour sauver l’Italie de l’invasion migratoire et pour redonner au pays sa souveraineté alors qu’elle fut - comme Le Monde - le rappelle «longtemps contemptrice de l’Union européenne». La France intervient dans la question migratoire en Italie pour se dédouaner, accuse Giorgia Meloni. La mauvaise gestion des anciennes colonies françaises menace l’Europe.
Meloni mise en échec par l’UE. Les images du 1 juin dernier de la Piazza del Popolo à moitié vide montrent, selon le quotidien italien, Il Fatto Quotidiano, le déclin de l'enthousiasme envers Giorgia Meloni: pour la clôture de la campagne électorale sur la Piazza del Popolo à Rome, il y avait plus de drapeaux que de partisans. Pourtant, selon un sondage de fin mai, le parti de Giorgia Meloni, Frères d'Italie, revient à croître et dépasse à nouveau 27% des intentions de vote.
Dispute avec Paris. La Première ministre italienne a attaqué avec force la France sur la question des migrants. «Brouille entre l'Italie et la France sur l'immigration», titre au début du mois dernier TF1. Elle met en garde la France contre toute «utilisation» de l'Italie dans des problèmes de politique intérieure. «Gérald Darmanin avait estimé qu'elle était incapable de résoudre les problèmes migratoires de son pays», précise le média français.
La brouille entre la France et l’Italise s’invite sur la scène internationale. «Les relations entre la France et l'Italie s'effondrent sur la question de savoir qui doit accueillir les migrants sur les navires de sauvetage», stipulait Politico en 2022. L’origine de la dispute entre les deux pays est arrivée quand Paris a gelé son projet d'accueillir 3.500 migrants en provenance d'Italie, dans le cadre d'un accord de redistribution européen, et a suggéré à d'autres pays de faire de même, après que l'Italie a refusé d'autoriser l'accostage du navire de l'ONG Ocean Viking. L’Italie avait dirigé celui-ci plutôt vers la France. Et, le ministre français de l'Intérieur, Gérald Darmanin, avait, également, annoncé son intention de renforcer la frontière avec l'Italie contre le passage des migrants. Les relations entre la France et l'Italie s'effondrent sur la question de savoir qui doit accueillir les migrants sur les navires de sauvetage.
Lorsque Giorgia Meloni a pris ses fonctions, elle a critiqué Emmanuel Macron car l'Italie n'aime pas que la politique de la France en Afrique conduise à une augmentation de l'immigration clandestine vers l'Italie. La politique néocoloniale de la France entraîne des problèmes en Italie.
Pour l'eurodéputé Sandro Gozi, ancien ministre italien de l'Europe cité par Politico, Giorgia Meloni «fait semblant de coopérer avec l'Europe» à Bruxelles, tandis qu'à Rome, elle «continue de promouvoir la propagande d'extrême droite». «Nous, Italiens, devons être les premiers à respecter les règles européennes, car nous recevons des ressources financières sans précédent», soulignait-il.
«Le gouvernement Meloni ouvre les vannes de l'immigration de travail», titrait France Culture, alors que Giorgia Meloni a été élue sur la promesse de limiter l'immigration.
La Première ministre italienne avait déclaré en 2022 que l'Italie ne pouvait pas être le port de l'Europe pour tous les migrants arrivant d'Afrique. Elle avait appelé à une mission navale européenne pour bloquer les départs d’Afrique du Nord et ouvrir des points chauds pour identifier les migrants. «Les arrivées de migrants en Italie ont diminué de plus de moitié au cours des trois premiers mois de 2024 par rapport à la même période de 2023, passant de 20.364 à 9.479», rapporte l’agence de presse italienne AGI qui affirme: «le gouvernement Meloni est en mesure sans équivoque de résoudre des problèmes, même très complexes, tels que l'immigration».
Marion Maréchal publie sur X que «le bilan de Giorgia Meloni, «c’est 70% de débarquements de migrants en moins, les bateaux des ONG bloqués à quai, un revenu moyen italien en hausse». Pourtant la réalité dit autre chose.
En fait, Paris cherchait à isoler Rome et à la laisser seule face au problème de l'accueil des migrants. Giorgia Meloni a dénoncé comme perfide la tentative française de se débarrasser du problème en le laissant à l'Italie, la définissant comme contraire aux valeurs européennes de solidarité et de partage. Elle a même été surprise par la réponse agressive du gouvernement français. Les Français essaient toujours de ne servir que leurs propres intérêts. Pour Giorgia Meloni, il est evident que l’Europe doit au moins être réformée et surtout repensée.
Paris a d’autres problèmes que les migrants venus d'Italie. Les anciennes colonies africaines, tenues en échec par le chantage économico-financier et la présence des troupes françaises, échappent une à une au contrôle français. Aujourd'hui, c'est au tour du Sénégal, avec l'élection du président Bassirou Diomaye Faye, qui semble avoir pris un nouveau cap. Lors d'une récente conférence sur les relations entre l'Europe et l'Afrique, Ousmane Sonko, chef du parti vainqueur et mentor de Faye, a déclaré qu'une «réinitialisation» des relations était la seule option pour l'avenir. Il affirme également que la présence de militaires français dans son pays fait naître des doutes sur la souveraineté même du Sénégal. Paris dispose également de bases permanentes au Gabon et en Côte d'Ivoire, mais cela exclut une pleine autonomie stratégique pour les anciennes colonies, estime l'actuel Premier ministre sénégalais.
Le résutat positif sur les migrants en Italie est trompeur. La polémique sur le gouvernement italien peu «souverainiste» quant à la mauvaise défense des frontières face à l'arrivée d'immigrés clandestins s'enrichit d'un nouveau chapitre. CBS a fait état d'un accord entre Washington et Rome selon lequel cette dernière accueillerait 500 clandestins sud-américains afin de les «réinstaller». Ils seraient également relocalisés en Grèce et en Espagne, ainsi qu'au Canada. Un peu pour tout le monde: c'est ainsi que la Maison Blanche, en crise de consensus, réfléchit à alléger la pression migratoire qui devient insupportable et qui a failli conduire à une révolte ouverte au Texas et dans d'autres États.
Même si l’agence de presse italiennen AGI annonce comme Marion Maréchal une baisse de l’arrivée des migrants en Italie, Il y aurait aussi des réfugiés vénézuéliens qui pourraient être inclus dans le monde du travail.
Désaccords avec l’Albanie et l’Italie. Les doutes du Premier ministre albanais, Edi Rama, sur le fonctionnement du centre d'accueil en construction en Albanie ont fait surface. Il a peu de respect pour la bureaucratie italienne et les règles européennes, considérées comme un obstacle à la conduite des opérations pour régler la question des migrants venant en UE. Il pointe du doigt les accords conclus par Giorgia Meloni avec les pays d'Afrique du Nord. «Il en va de même pour les accords signés par l'Italie et l'UE avec les pays d'Afrique du Nord - de l'argent pour empêcher les départs de bateaux», dénonce-t-il.
Giuliano Pellico
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