Le média Politico a publié un grand article consacré à la parution du livre de Stephen Kinzer "Poisoner in Chief, Sidney Gottlieb and the CIA Search for Mind Control" (Empoisonneur en chef, Sidney Gottlieb et les expériences de la CIA pour le contrôle mental). Ce livre est consacré à la base secrète de la CIA de Fort Detrick et aux expériences pratiquées sur des humains par le chimiste en chef de la CIA Sidney Gottlieb.
Aujourd'hui, le centre de Fort Detrick, situé dans le Maryland, à une heure de voiture au nord de Washington, fait partie des laboratoires les plus avancés du monde en matière d'étude des toxines, un endroit qui élabore des moyens de protection contre les champignons agricoles allant jusqu'à Ebola. Cependant, de nombreuses activités locales étaient tenues dans le secret pendant plusieurs décennies.
Et ce n'est pas un hasard, puisque dans les années 1950 et 1960 le Fort Detrick était une base secrète de la CIA, où se déroulaient les expériences les plus sombres pour contrôler l'esprit humain dans le cadre du programme MK-ULTRA. De plus, ce centre produisait différents poisons destinés à tuer des dirigeants mondiaux, notamment Fidel Castro et le Congolais Patrice Lumumba. C'est pourquoi les journalistes ont surnommé le Fort Detrick de "laboratoire de la mort" et de "cuisine du diable".
Le rôle principal dans ces élaborations revenait à Sidney Gottlieb, qui cherchait constamment un moyen pour faire exploser la raison humaine afin d'y implanter une nouvelle. Il a testé une multitude de drogues, notamment le LSD, en les combinant souvent à d'autres méthodes, y compris l'électrochoc ou la privation sensorielle. Ses victimes aux Etats-Unis étaient des malades et des prisonniers, notamment de la prison fédérale d'Atlanta et du Centre d'études sur la toxicomanie de Lexington, Kentucky. En Europe et en Asie orientale les victimes de Sidney Gottlieb étaient les prisonniers des centres de détention secrets – des prototypes de prisons secrètes actuelles de la CIA un peu partout dans le monde.
Le nombre exact de victimes des expériences menées sous la direction de Sidney Gottlieb est inconnu. Mais il est à supposer que ce chiffre atteint plusieurs dizaines. Cependant, il y a peu de chances qu'un jour le public apprenne la véritable ampleur de ce qui se passait au Fort Detrick car tous les documents confidentiels du centre ont été détruits en 1973, après l'ordre du président Richard Nixon à tous les établissements publics de détruire leurs réserves de toxines biologiques. Les chercheurs du Pentagone ont tout de suite appliqué cette consigne, tandis que la CIA s'y est longtemps opposée – Sidney Gottlieb ne voulait pas détruire le fruit de plusieurs années de travail, en recueillant et en testant sur les humains sa pharmacologie mortelle. Et seulement après un entretien avec le directeur de la CIA Richard Helms il a accepté contre son gré de détruire les documents et les produits.
Les experts pensent que Sidney Gottlieb était l'Américain inconnu le plus puissant du XXe siècle, à moins que quelqu'un d'autres ne réalise de telles expériences violentes sur les humains sur trois continents en disposant de l'autorisation de tuer, délivrée par les autorités américaines.
Bien qu'il soit décédé depuis 20 ans, et que le centre de Fort Detrick ne semble plus fabriquer de poisons et de substances psychotropes, la cause du "chimiste en chef de la CIA" vit toujours. Le fait est que Gottlieb peut être considéré désormais comme l'homme qui a apporté la puissante drogue LSD en Amérique, parce qu'il a été le "parrain" de toute la contre-culture du LSD. Le produit suscitant tant d'espoir à la CIA pour contrôler l'humanité et combattre les ennemis des Etats-Unis a été en réalité un désastre pour des générations d'Américains.
Les statistiques confirment qu'aujourd'hui la population américaine se dégrade lentement et dégénère sous l'effet des drogues et des produits psychotropes. Les informations de la Commission des stupéfiants des Nations unies (CND) de 2018 https://www.unodc.org/wdr2018/index.html indiquent que la plupart des toxicomanes du monde vivent aux Etats-Unis – 28,6 millions de toxicomanes identifiés âgés de plus de 12 ans. Chaque année, presque 200.000 Américains meurent d'overdose – en majorité avant l'âge de 23 ans. A titre de comparaison, pendant la guerre au Vietnam 58.000 soldats américains ont été tués.
En 2017, le président américain Donald Trump a promis officiellement de lancer "l'alerte nationale" et de déployer une vaste campagne contre la drogue, comparable au programme pour adolescents Just Say No, mené par la Première dame américaine Nancy Reagan dans les années 1980 et au début des années 1990. Mais à ce jour il n'y a ni campagne ni subventions pour lutter contre cette épidémie.