Après de nombreuses menaces, de nombreux désaccords avec la politique allemande, le président Donald Trump semble désormais sérieux car il a déclaré selon le Wall Street Journal vouloir retirer 9 500 soldats américains d'Allemagne. Ce geste mettant dans un premier temps Berlin en colère peut permettre à l'Allemagne et aux autres pays de l'Otan de l'Union européenne de l'Est de se réorganiser militairement tout en profitant à la Russie.
La décision est effective car le conseiller à la sécurité de Donald Trump, Robert O'Brien, a signé une directive selon laquelle 9 500 soldats américains devraient quitter l'Allemagne d'ici le mois de septembre pour être relocalisés dans d'autres pays de l'Otan en Europe ou devraient retourner aux Etats-Unis. «En outre, le nombre maximal de soldats séjournant en Allemagne en même temps doit être réduit presque de moitié, passant de 52 000 à 25 000», précise le Süddeutsche Zeitung ce qu'il qualifie comme étant une «faveur pour Poutine» en reprenant les mots du vice-président du Comité des forces armées, Jack Reed, qui a critiqué les plans de Donald Trump comme étant «mesquins et absurdes» tout en déclarant que c'était «une faveur pour Poutine».
34 500 soldats américains sont actuellement stationnés en Allemagne. 17 000 fonctionnaires américains et 12 000 civils allemands travaillent pour les forces armées américaines. Avec un tel retrait de soldats, les forces armées américaines ne seraient alors plus en mesure de planifier des exercices vers l'Allemagne comme cela était le cas auparavant. S'ils voulaient maintenir ces exercices, il faudrait fermer des installations qui sont d'une grande importance pour la présence américaine en Europe, en Afrique, en Afghanistan et au Moyen-Orient. Cela comprend un certain nombre de sièges sociaux et de bases logistiques ce qui fait dire à l'ancien commandant américain de l'armée américaine en Europe, Ben Hodges, ou à l'ancien ambassadeur américain auprès de l'Otan, Ivo Daalder, que la deuxième partie de l'ordre est potentiellement encore plus sérieuse.
Avec la décision du président américain, la base aérienne de Ramstein risque de fermer. Cette plus grande base américaine en dehors des États-Unis, en étant le siège de l'US Air Force pour l'Europe, est le centre d'approvisionnement le plus important pour mener les missions au Moyen-Orient, en Afghanistan et en Afrique mais aussi la base de contrôle pour les opérations de drones volant sur ces zones. De plus, les forces armées américaines transportent des blessés de ces zones d'opération vers l'hôpital militaire de Landstuhl qui est le plus grand en dehors des États-Unis. Le Süddeutsche Zeitung explique que Donald Trump, souhaitant faire venir les soldats d'Allemagne, veut également réduire la présence américaine en Irak et aussi faire venir des troupes d'Afghanistan.
Jusqu'à présent, il n'est pas clair de savoir quels groupes pourraient être affectés par le retrait. Stars and Stripes, le journal des forces armées américaines, cite des responsables du Pentagone pour lesquels les plans n'y sont pas connus. Selon d'autres rapports, cependant, ils auraient été coordonnés avec le secrétaire à la Défense Mark Esper et préparés par le chef d'état-major Mark Milley depuis le mois de septembre dernier. Der Spiegel rapporte que des membres du Congrès américain ont été informés qu'entre 5 000 et 15 000 soldats américains devaient être retirés d'Allemagne. Selon le Wall Street Journal, le Pentagone n'a pas encore donné son approbation finale. Le Conseil de sécurité nationale ne participerait pas comme d'habitude au processus décisionnel.
En Allemagne la CDU comme, Norbert Röttgen (CDU), président de la commission des affaires étrangères du Bundestag, est d'avis qu' «une telle réduction serait très regrettable à tous points de vue» car «les soldats américains sont les bienvenus en Allemagne et la coopération se passe bien». Par contre, Rolf Mützenich, le chef du groupe parlementaire du SPD, a déclaré qu'un retrait aussi important des troupes américaines serait «un tournant», que «cela mettrait en péril le bon fonctionnement de nombreuses installations des forces armées américaines en Allemagne mais que, cependant, un tel retrait serait également «l'occasion d'incorporer la politique de sécurité allemande dans un environnement européen, ce qui est urgent et sensé compte tenu de la politique américaine actuelle».
Dietmar Bartsch, le chef du groupe des Linke, a écrit sur Twitter: «Le retrait des troupes américaines doit être considéré comme une opportunité»; «Le gouvernement fédéral devrait accepter cela avec gratitude et préparer rapidement le retrait complet des soldats américains avec l'administration Trump», «ceux-ci devraient alors également emporter avec eux les bombes atomiques américaines»; «Une réduction américaine serait une bonne chose». Le premier ministre Mateusz Morawiecki (PIS, droite conservatrice), espère que de nouveaux soldats américains seront stationnés en Pologne car «cela renforcera le flanc oriental de l'Otan».
Pierre Duval