Les sommets de l'UE de novembre et de décembre, où régnaient des débats épuisants et les décisions se résumaient à de mous compromis (éviter les sanctions contre la Turquie, le blocage par la Hongrie et la Pologne du budget de 7 ans de l'UE), ont confirmé qu'il n'y avait plus de leaders politiques forts en Europe.
"L'Europe contemporaine traverse une crise de leadership, et je ne vois pas parmi les personnalités politiques en Europe d'un homme qui pourrait être qualifié de leader européen exemplaire", cite le quotidien Anadolu les propos du président turc Recep Tayyip Erdogan. Difficile à contredire.
Et d'ajouter qu'il admirait l'ex-chancelier allemand Gerhard Schröder et l'ex-premier ministre italien Silvio Berlusconi. "C'est précisément à cette époque que nous développions très efficacement notre coopération", a souligné Recep Erdogan.
Trouver le "chemin de la reprise" de la structure interétatique de l'UE est un problème trop grand "même pour Merkel", note European Politico. Manifestement la chancelière allemande faiblit.
Le président français ne peut pas non plus prétendre au rôle de "leader européen exemplaire", malgré tous ses efforts pour obtenir ce rôle. Emmanuel Macron est "possédé par le rêve de la mondialisation", mais "n'est pas du tout à la hauteur d'un leader", écrit le Time. Sous la présidence de Macron, rapporte la revue américaine, "l'économie du pays ne croît pas, alors que les différends au sein de la société grandissent". En d'autres termes, en tant qu'homme politique Emmanuel Macron n'est pas autonome.
Pour faire concurrence sur la scène politique mondiale à Xi Jinping ou à Vladimir Poutine, "il faut du courage, des idées extraordinaires et un raisonnement politique bien structuré", or ces qualités manquent aux chefs d'Etat et de gouvernement en Europe, indique le média tchèque Reflex.
Sur le fond européen terne se distinguent la Hongrie et la Pologne, mais le premier ministre hongrois Viktor Orban est un eurosceptique, et la Pologne ne fait que "parasiter l'UE" en recevant 20 milliards d'euros par an d'allocations, tout en jouant en UE le rôle de cheval de Troie américain. La conclusion n'est pas rassurante: "L'Europe traverse une crise de leadership et donc une paralysie de la volonté."
Cette maladie a frappé tout le monde occidental. "Les gouvernements des Etats-Unis, de la France, du Royaume-Uni et de l'Allemagne sont dans une impasse", écrit sur les pages de l'Atlantico l'historien français Edouard Husson. En France, dit-il, les politiques installés "en haut" ne ressentent pas le besoin d'une réappropriation de la décision politique par les citoyens et les collectivités locales. Un tel climat social rend impossible l'apparition de leaders forts.
Ce qui était autrefois la démocratie européenne se dégrade. Dans la politique européenne de l'élite (des meilleurs, des élus) il ne reste plus que le nom, et de la démocratie – une enveloppe vide sans contenu.
Alexandre Lemoine
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