Les ministres des Affaires étrangères des 27 pays membres de l'UE ont chargé Josep Borrell, Haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, de présenter d'ici novembre le projet de premier concept militaire européen. C'est ce que stipule la déclaration du Conseil de l'Union européenne, qui s'est réuni à Bruxelles ce lundi 10 mai. Le projet en question a été baptisé "Boussole stratégique". Il pourrait être adopté d'ici mars 2022.
L'élaboration de ce projet tiendra compte des documents du SIAC (Single Intelligence Analysis Capacity) de l'UE, qui a procédé à une analyse "globale" de menaces à partir des informations obtenues de la part des renseignements des Etats membres de l'Union. "Cette première expérience précieuse et les leçons tirées devraient conduire à un processus plus global et régulier d'analyse des menaces et des défis pour l'UE", stipule le communiqué de presse publié sur le site du Conseil.
D'après lui, le projet de "Boussole stratégique" renforcera et aidera à "guider les ambitions" de l'UE en matière de sécurité et de défense. "En conformité avec son programme stratégique 2019-2024, le Conseil appelle l'UE à suivre une ligne d'action plus stratégique et à renforcer sa capacité à agir de manière autonome. L'UE devrait promouvoir ses intérêts et ses valeurs, et être capable de faire face aux menaces et défis qui pèsent sur la sécurité mondiale", indique le communiqué de presse.
Le Conseil de l'UE estime qu'une "UE forte dans le domaine de la sécurité et de la défense apportera des avantages tangibles à la coopération transatlantique et mondiale". Le Conseil a également réaffirmé le caractère incontournable des partenariats internationaux avec les organisations multilatérales telles que les Nations unies et l'OTAN.
L'Otan met également au point un nouveau concept stratégique. On s'attend à ce que pour la première fois depuis la fin de la Guerre froide la Russie soit qualifiée dans le document non pas de partenaire, mais de "principale menace militaire". Les relations avec la Russie ont été évoquées en mars pendant la réunion des ministères des Affaires étrangères de l'Otan, avec la participation aux pourparlers de Josep Borrell et des ministres des Affaires étrangères de la Finlande et de la Suède (ces deux pays font partie de l'UE mais pas de l'Otan). Comme l'a déclaré le secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg, "la Russie sape et déstabilise la situation dans les pays voisins, notamment en Ukraine, en Géorgie et en Moldavie", ainsi que diffuse de la désinformation et agit de manière agressive dans le cyberespace. De plus, le Royaume-Uni a qualifié la Russie de "la plus grande menace directe" pour la sécurité dans sa Revue intégrée de la politique étrangère et de défense d'ici 2030 publiée en mars.
Comme l'indique le communiqué sur le site du Conseil de l'UE, Josep Borrell devra présenter le projet en question en novembre prochain. "Le Conseil invite le haut représentant pour les affaires étrangères et la politique de sécurité à présenter un premier projet de boussole stratégique devant faire l'objet d'un débat au Conseil en novembre 2021", stipule le texte.
En février, le président français Emmanuel Macron a déclaré que l'Europe ne devait pas "déléguer la protection" aux Etats-Unis, mais défendre elle-même ses intérêts en coopérant dans le secteur militaire. "Je suis un défendeur de la souveraineté européenne, de l'autonomie stratégique non pas parce que je suis contre l'Otan ou que je doute de nos amis américains, mais parce que je suis lucide quant à l'état dans lequel le monde se trouve", avait noté le chef de l'Etat français.
Alexandre Lemoine
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