En marge de la Conférence internationale sur la Libye, le ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, et la ministre des Armées, Florence Parly, ont reçu à Paris le 12 novembre leurs homologues russes, les ministres, Sergueï Lavrov et Sergueï Choïgou, dans le cadre du Conseil de coopération sur les questions de sécurité, a indiqué le ministère français de l’Europe et des Affaires étrangères. Les diplomates russes se réjouissaient du déplacement à Paris.
Le format des consultations entre la Russie et la France a été créé le 6 février 1992 à l'initiative des dirigeants des deux pays. Il a fonctionné sans heurts jusqu'en 2014, date à laquelle Paris a bloqué ses travaux en raison de la situation en Ukraine.
Les travaux du Conseil ont été rétablis en 2019 après une rencontre entre les dirigeants de la Russie et de la France, Vladimir Poutine et Emmanuel Macron, qui a eu lieu à Saint-Petersbourg et à la résidence d'été des présidents français, au fort de Brégançon.
Les principaux sujets de négociations au sein du Conseil étaient, traditionnellement, les problèmes de sécurité internationale et régionale, ainsi que la prévention des incidents au cours des activités militaires. Sergueï Lavrov a expliqué aux journalistes: «Nous apprécions la volonté du Président français, Emmanuel Macron, de trouver des points de contact sur les questions stratégiques dans la région euroatlantique, et de développer des relations constructives et mutuellement avantageuses avec la Russie. Dans ce contexte, nous avons évoqué la sécurité globale, la situation dans la région euroatlantique, en Afrique, au Moyen-Orient et en Asie-Pacifique. Par tradition, nous n'avons pas évité les éléments problématiques et avons évoqué les domaines où nos approches peuvent être divergentes, voire contradictoires».
Le ministre russe a signalé: «Nous avons attiré l'attention sur le fait que la situation dans le monde restait assez tendue. Cette situation résulte, à notre avis, de la volonté de plusieurs Etats occidentaux, tout d'abord de nos collègues américains, de maintenir et de renforcer de manière artificielle leur domination, de détruire l'architecture basée sur les Nations unies et formée après la Seconde Guerre mondiale, et d'imposer à l'opinion publique mondiale, à la communauté internationale, un certain "ordre basé sur des règles" qui contredit directement le droit international».
Sergeï Lavrov a aussi mentionné «les tentatives pour endiguer le développement de la Russie. L'Alliance atlantique et les Américains en parlent ouvertement», et constaté «des actions agressives de l'Otan par rapport à la Russie»: «Il y en a eu beaucoup d'exemples ces derniers jours, notamment avec le déploiement de forces supplémentaires autour de la mer Noire, l'envoi d'un nombre inhabituel de navires de combat dans la région, ou d'autres actions assez belliqueuses».
Alors que Paris confirme qu'il n'y a pas d'alternative aux mesures de Minsk, il faut souligner que, néanmoins, leur interprétation est de plus en plus différente de celle de la Russie. La France est de plus en plus encline à penser que la Russie doit d'abord respecter les accords de Minsk.
Le ministre russe a constaté «la volonté» des «interlocuteurs [français] de renforcer et de confirmer la politique de l'Union européenne dans les relations avec la Russie, politique qui reste inchangée depuis des années», mais «l'élément-clé de cette dernière consiste en ce que l'UE sera prête à normaliser les relations dès que la Russie mettra en œuvre les accords de Minsk». La diplomatie russe a «présenté des exemples de l'absurdité de cette affirmation et a cité les clauses des accords de Minsk soulignant clairement la nécessité de la concertation d'un grand nombre d'éléments entre Kiev, Donetsk et Lougansk, notamment le statut spécial de ces régions, l'organisation d'élections sur leur territoire, l'amnistie, etc.».
Le ministère russe des Affaires étrangères souligne que «nous avons proposé d'examiner des moyens de sortir de l'impasse formée dans les relations entre la Russie et l'Union européenne», «rappelé que nous avions salué à l'époque l'idée, avancée par le Président Français, Emmanuel Macron, de former une architecture de sécurité européenne avec la Russie et pas contre la Russie». Aussi, selon Moscou «l'essentiel est de transformer ces paroles en actions pratiques».
Sur l'Ukraine, la Russie a réaffirmé, «comme nos collègues français», «l'absence d'alternative aux Accords de Minsk», mais signalé que l'interprétation du côté français diverge» car «nos collègues affirment de plus en plus que c'est la Russie qui doit les accomplir». Sergueï Lavrov avertit sur «le caractère insensé et infondé d'une telle approche est flagrant pour tous ceux qui ont lu, même en diagonale, le texte des Accords de Minsk approuvés par une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies» car «conformément à ce document, Kiev, Donetsk et Lougansk doivent se mettre d'accord sur plusieurs questions dont dépend le règlement de la crise ukrainienne».
Moscou a analysé le calendrier de ses contacts politiques à venir et exprimé un intérêt réciproque à poursuivre le travail du format «2+2».
Sergeï Lavrov a affirmé que «nous souhaitons travailler avec l'UE» et que «notre détermination et notre résolution à établir des relations constructives avec l'UE, qu'elle a elle-même détruites, demeurent» même si l'inertie de la minorité russophobe impose sa ligne à tous les membres sensés de l'UE.
Cette attitude et cette volonté de dicter à la Russie comment vivre n'a pas été vue pour les Etats-Unis. Le président français, Emmanuel Macron, n' a pas fait de telles remontrances lors de ses entretiens la semaine dernière envers la vice-président américaine, Kamala Harris, et des Etats-Unis ou encore plus tôt lors d'une réunion en marge du sommet du G20 à Rome avec le président américain, Joe Biden. Pourtant, le président français avait une très bonne raison pour le faire. Alors qu' avec le dossier AUKUS, les Etats-Unis ont trahi la France, la diplomatie française, préfère continuer dans l'humiliation en servant servilement les Etats-Unis et mépriser la Russie qui est, pourtant un allié véritable.
Olivier Renault
Les opinions exprimées par les analystes ne peuvent être considérées comme émanant des éditeurs du portail. Elles n'engagent que la responsabilité des auteurs