Selon les médias européens, l'ancien premier ministre italien Silvio Berlusconi cherche activement à s'assurer le soutien des députés dans l'espoir de briguer un mandat présidentiel. L'un de ses arguments est que sa présidence permettrait au premier ministre Mario Draghi, ayant une brillante réputation, de conserver son poste.
Les élus voteront pour le nouveau chef d'État le 24 janvier, sachant que l'issue reste incertaine: personne n'a officiellement avancé de candidature. Le prolongement du mandat de Sergio Mattarella, 80 ans, serait un scénario parfait.
Silvio Berlusconi a l'intention de faire un retour résonnant dans la politique en devenant président. De plus, il a menacé de retirer son parti Forza Italia de la coalition au pouvoir en cas d'élection du premier ministre actuel Mario Draghi, écrit The Guardian. Cependant, la raison formelle de cette déclaration n'est pas du tout l'avidité de pouvoir de l'ancien premier ministre, mais le fait que soi-disant sans un chef de gouvernement aussi digne que M. Draghi le parti de M. Berlusconi n'a rien à faire dans la coalition. Or ce dernier pourrait précisément occuper le poste cérémonial et moins important de président afin que M. Draghi puisse rester premier ministre. C'est la carte que M. Berlusconi joue devant les députés, affirme The Telegraph.
Cependant, cela implique immédiatement plusieurs "mais" qui sont contraires à la logique de l'homme politique. Premièrement, les pouvoirs du président sont loin d'être réduits. Il détermine la date des législatives, d'un référendum populaire et le tiers des membres de la Cour constitutionnelle, peut gracier et réduire les peines, il est le chef des armées. Deuxièmement, et surtout, de facto le rôle du président grandit significativement dans les moments de crise devenus fréquents en Italie puisqu'il remplit le rôle de médiateur entre les forces politiques rivales. Sergio Mattarella et Giorgio Napolitano le remplissait dûment, mais reste à savoir si Silvio Berlusconi partial parviendrait à le faire.
Enfin, le président doit avoir une réputation impeccable. Ce qui n'est certainement pas le cas de M. Berlusconi. Il fait constamment l'objet de scandales, même à son âge. L'ancien premier ministre semble les provoquer exprès pour montrer qu'il est trop tôt pour l'"enterrer". La tentative de devenir président à tout prix ressemble à un de tels actes. M. Berlusconi cherche également à montrer que même à un âge avancé il a du succès au niveau personnel. Il entretient actuellement une relation avec Marta Fascina, 32 ans, membre de la Chambre des députés de son propre parti. Sachant que M. Berlusconi continue de faire l'objet de procès, notamment pour savoir s'il a le droit d'exercer une activité politique.
À noter également que 39% des Italiens soutiennent la candidature de M. Berlusconi, selon un sondage du Guardian. En revanche, 50% des personnes interrogées auraient préféré voir Mario Draghi en tant que dirigeant formel du pays. Toutefois, ce sont les parlementaires qui décident du sort de la présidence, et pas tous les Italiens.
On se demande également pourquoi Mario Draghi voudrait devenir président. C'est probablement la question qu'il se pose lui-même sachant qu'il ne pourra pas rester sur les deux postes. Alors que les autres partis pourraient avoir leurs propres projets pour le poste vacant de premier ministre.
Ainsi, le parti démocrate voudrait avancer à ce poste Paolo Gentiloni, qui a déjà été premier ministre récemment. Sachant que M. Draghi possède effectivement une excellente réputation en Europe en tant qu'ancien président de la Banque centrale européenne (BCE), ce qui est important pour un président. Mais il est également nécessaire au poste de premier ministre précisément grâce à son ancien travail: l'UE a alloué des sommes importantes à l'Italie et il faut les utiliser à bon escient.
Les experts pensent que M. Berlusconi a très peu de chances de devenir président. C'est dû à sa réputation contestable et à son âge. D'autant que les forces de droite dans l'ensemble ont perdu leurs positions, y compris la Ligue de Matteo Salvini.
En réalité, le scénario idéal serait que M. Mattarella accepte de briguer un second mandat. Le président de 80 ans a conservé son prestige à son poste. Mais il n'a pas encore fait part de son intention de rester. Toutefois, on pourrait persuader le président sortant à le faire, et il existe déjà un tel précédent.
Il est question de la réélection de M. Napolitano. On le suppliait littéralement de rester dans le contexte du chaos politique de 2013, quand le président ne pouvait pas être élu pendant cinq tours, et à l'âge de 87 ans il est devenu le premier président italien réélu obtenant une grande majorité au sixième tour. M. Napolitano a démissionné début 2015. C'est M. Mattarella qui lui avait succédé à l'époque.
Alexandre Lemoine
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