22.08.2022
Emmanuel Macron promeut l'idée de créer un nouveau format de société européenne qui devra assurer une couverture géographique plus large avec la création d’une «Communauté politique européenne». Malgré les nobles objectifs de l'initiative annoncée, elle manque peut-être d'élan. Le souhait de s'orienter vers le chemin allant sur la confédération est, cependant, lancé, pour viser à un nouveau format de coopération entre les Etats européens.
Le prochain Premier ministre britannique pourrait être invité à rejoindre un sommet informel de l'UE qui se tiendra à Prague en octobre à l'initiative de la France. D'ailleurs, le nom de ce prochain Premier ministre et chef du Parti conservateur devrait être annoncé en septembre. L'ancien ministre des Finances, Rishi Sunak, et la ministre des Affaires étrangères, Liz Truss, sont entrés dans la phase finale du duel politique.
Les initiés disent que Londres est invitée à soutenir le concept d'une «UE élargie» ou de «Communauté politique européenne». Prévu pour l'automne, le sommet «aura certainement une portée plus large» que l'adhésion standard à l'UE, ont confirmé des responsables du gouvernement tchèque, qui préside le Conseil de l'UE depuis juillet. Des informations sur cette réunion ne sont pas claires pour le moment. Observateur Continental a rapporté que le chancelier allemand, Olaf Scholz, a été le premier responsable politique avec lequel Emmanuel Macron a mené des négociations sur ce point. Auparavant, le président français avait, justement, proposé ce projet pour rallier les pays démocratiques d'Europe. Selon lui, la création de cette «Communauté politique européenne» devrait inclure, à la fois, les membres et les non-membres de l'UE, y compris le Royaume-Uni et l'Ukraine.
Pour Emmanuel Macron l'Union européenne «ne peut pas être le seul moyen de structurer le continent européen à court terme» car, selon lui, les pays doivent former leur propre «communauté politique» qui permettrait aux nations démocratiques d'Europe «de trouver un nouvel espace de coopération, en matière de politique, de sécurité, d’énergie, de transport, de libre circulation des personnes». Observateur Continental rajoutait que «l'objectif de ce nouvel ensemble serait d'intégrer les pays candidats en attendant l'achèvement des très longues procédures d'adhésion, qui prennent parfois plusieurs «décennies» de l'aveu du locataire de l'Elysée.
Le président français n'a pas précisé comment les privilèges de l'adhésion seraient contrebalancés par des obligations formelles. De plus, il n'y avait aucun détail sur ce que la formule, déjà baptisée «EC-light», pour ce que cela signifie pour le secteur de la sécurité. La seule chose sur laquelle le propriétaire de l'Elysée a attiré l'attention touche au le fait que des habitants d'Ukraine, de Moldavie et de Géorgie ont annoncé leur volonté d'adhérer à l'Union européenne et que cela oblige le continent européen à repenser son organisation.
Macron n'a pas été le premier à proposer un tel plan ces derniers mois. Enrico Letta, chef du Parti démocrate d'Italie, a parlé du concept de renforcement des liens de l'UE avec les pays partenaires dont l'Ukraine avant de leur accorder l'adhésion officielle. Il prône la création d'une «confédération européenne» avec un centre fédéral intégré et l'élimination des mécanismes controversés tels que le veto national et la règle de l'unanimité.
L'histoire se répète. Dans l'ensemble, l'idée de créer une confédération sur le continent appartient aux hommes politiques français. Il y a 30 ans, le président socialiste, François Mitterrand, s'exprimant à la télévision lors d'un discours du Nouvel An, a présenté une proposition de création d'une «confédération européenne» qui réunirait les pays «dans une organisation commune permanente basée sur le commerce, la paix et la sécurité». La base formelle devait être les accords d'Helsinki.
L'idée de François Mitterrand est alors devenue la réponse aux questions les plus urgentes auxquelles la communauté européenne était confrontée après la chute du mur de Berlin. Cela touché l'avenir de l'Otan et le sort des pays du Pacte de Varsovie, et les problèmes de rythme de désarmement avec es défis en termes de coopération entre l'Est et l'Ouest. Selon ce concept, la «confédération européenne» était censée inclure l'Union soviétique qui subissait alors la perestroïka.
Malgré le soutien de Jacques Delors, président de la Commission européenne et proche allié de François Mitterrand, la proposition du dirigeant français n'a abouti, dans l'ensemble, à aucun véritable engouement hors de France, même si le concept ne contredit pas ce qu’existait depuis 1957 avec la Communauté économique européenne. Ce concept était destiné à jouer le rôle d'une structure parallèle.
Les Etats-Unis se sont tacitement opposés à l'idée de François Mitterrand parce qu'elle ne les impliquait pas directement. L'Allemagne a refusé de soutenir une telle institutionnalisation des relations intra-européennes sans présence américaine. Les pays d'Europe de l'Est, à leur tour, ont également montré du scepticisme à l'égard d'une telle organisation dont la composition implique de travailler avec Moscou, mais n'implique aucun rôle pour Washington.
De plus, les acteurs, alors candidats à l'adhésion à la Communauté économique européenne, considéraient l'initiative de François Mitterrand comme un moyen de retarder leur véritable intégration. Il y a peu de raisons de croire que l'histoire qui date de trente ans ne se répétera pas maintenant.
Forum insatisfait. Selon Michael Lee, expert de l'Université Johns Hopkins, une organisation de la communauté européenne, qui est représentée dans la description du dirigeant français et des politiciens italiens, peut transmettre un certain message de solidarité et d'inclusion, ainsi que déboucher sur de nouvelles formes d' «intégration différenciée». Cependant, l'analyste met en garde: le concept devrait être un tremplin vers l'adhésion à l'UE, et non une alternative à celle-ci.
«Je pense qu'il y a une idée louable d'une UE active qui cherche à vraiment interagir avec le monde, au lieu de regarder comment quelque chose passe, ou d'isoler ses citoyens des phénomènes qui se déroulent dans le monde extérieur», déclare à son tour Andrew Smith, professeur à l'Université de Chichester. De plus, selon lui, un facteur positif est la volonté d'interagir avec Londres de manière à éviter les différends diplomatiques.
Pourtant, selon le chercheur, hors de France, l'idée d'Emmanuel Macron pourrait s'avérer moins séduisante en pratique qu'en théorie: sur fond d'absence d'objectifs précis et détaillés, les acteurs auront des craintes croissantes que la plateforme de «la nouvelle UE» créera un «forum de parole politique» des candidats mécontents, «frustrés par le temps qu'il leur faut pour entrer», souligne Andrew Smith.
L'idée d'Emmanuel Macron risque de connaître le même sort que celle de François Mitterrand, confirme dans le même temps Richard Whitman, professeur à l'université du Kent: «Si vous lisez les conclusions détaillées du Conseil de l'Europe à ce sujet, ce qu'ils disent annule fondamentalement l'idée». La raison est l'accent mis par d'autres pays sur le fait que le nouveau concept ne doit pas saper l'UE ou le processus d'élargissement ressemble généralement à une opposition. Pour Richard Whitman. Il existe de nombreuses autres façons de soutenir les pays qui souhaitent s'intégrer à l'UE.
Pierre Duval
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