04.10.2022
Un think-tank américain affirme que les États-Unis ne pourront pas vaincre la Chine et conseille de ne pas s'engager à défendre Taïwan.
Les ministres de la Défense des États-Unis, du Japon et de l'Australie se sont mis d'accord d'élargir leur coopération militaire pour réagir à la menace émanant de la Chine pour Taïwan et toute la région indopacifique.
Après une réunion à la base américaine à Hawaï, le chef de la défense japonaise Yasukazu Hamada a déclaré que les trois pays étaient très préoccupés par le comportement agressif de la Chine, notamment par les essais de missiles balistiques lancés lors de la visite sur l'île de Nancy Pelosi, présidente de la Chambre des représentants des États-Unis, et tombés dans la zone économique exclusive du Japon.
La déclaration des trois ministres comporte à la fois un message belliqueux et modéré. Ils ont également appelé à régler de manière pacifique les problèmes entre Pékin et Taipei.
D'un autre côté, la vice-présidente américaine Kamala Harris, lors de son récent voyage au Japon et en Corée du Sud, a déclaré que les États-Unis agiraient sans crainte ni hésitation aussi bien vis-à-vis du détroit de Taïwan que de toute l'Asie.
Washington ne fait que dérouler davantage la spirale de la tension par ses déclarations contradictoires. Ce qui n'a pas été apprécié par toute la communauté d'experts américains. L'influent Brookings Institution a publié un rapport indiquant que les États-Unis ont perdu leur domination sur la Chine en termes d'armes conventionnelles en Asie orientale. C'est pourquoi il leur serait plus difficile d'empêcher une attaque sur Taïwan.
Le document rappelle que l'armée chinoise investit de plus en plus dans les missiles, le renseignement, les moyens de transmission, les communications et la cyberguerre. "Il est difficile de prédire l'issue d'une confrontation sino-américaine pour Taïwan, on ne peut pas dire que la victoire des États-Unis et de leurs alliés soit garantie", reconnaissent les auteurs du rapport.
Mais le général Anthony Cotton, dont la candidature a été avancée par la Maison Blanche au Sénat au poste de chef des opérations nucléaires du Pentagone, a déclaré que l'arme nucléaire pourrait permettre d'empêcher une attaque sur Taïwan. Brookings Institution balaye cette idée. La guerre à cause de l'île, indique le rapport, ferait forcément "augmenter le risque d'une escalade préméditée ou non préméditée".
Il était estimé jusqu'à récemment que la Chine possède environ 200 ou 300 ogives nucléaires. Alors que les États-Unis et la Russie en possédaient plus de 4.000 chacun. Mais en novembre dernier, le Pentagone a annoncé que d'ici 2027 la Chine pourrait disposer de plus de 700 ogives, et d'au moins 1.000 d'ici 2030. Sachant que si les États-Unis voulaient de nouveau obtenir un avantage en matière d'armes nucléaires, ils seraient confrontés à de sérieux obstacles. Il s'agit de l'engagement de la Maison Blanche à maintenir la stabilité stratégique et le contrôle des armes nucléaires. "Mais même en surmontant ces obstacles, les États-Unis ne pourraient probablement pas obtenir une quantité suffisante de plutonium pour concurrencer la Chine, sans parler de la Russie", précise le rapport.
Cette situation n'est pas réjouissante pour Washington. Quelle solution propose-t-on? Du point de vue des intérêts américains il serait préférable d'éviter un engagement ferme à défendre Taïwan. Au lieu de cela, les États-Unis et leurs alliés doivent clairement faire comprendre qu'ils "se sépareront de la Chine économiquement et réduiront leur dépendance économique de Pékin". Par conséquent, il ne faut pas espérer pouvoir empêcher le conflit ou le terminer à des conditions acceptables en cas d'usage de l'arme nucléaire. Telle est la suggestion du think-tank.
Cependant, il est trop tôt pour dire que Washington a perdu sa position dominante. Les forces armées américaines possèdent une grande expérience de participation à divers conflits, d'interaction entre tous les types de forces armées - l'aviation, la flotte, l'armée de terre. Et elles disposent de systèmes de renseignement spatiaux. Comme le montre l'exemple en Ukraine. Peu de choses sont connues sur la Chine en ce sens. Les Américains sont très probablement plus forts. Sachant qu'ils ont plus de capacités pour frapper les régions les plus vulnérables de la côte orientale de la Chine. Ils peuvent utiliser des missiles, l'aviation et la flotte. Les capacités de la Chine sont moindres. Mais surtout, les États-Unis et la Chine sont étroitement liés économiquement. Le chiffre d'affaires du commerce bilatéral dépasse 700 milliards de dollars.
En ce qui concerne l'option nucléaire, en cas de conflit chaque partie est capable d'infliger à l'adversaire un préjudice inacceptable. Pékin a déclaré à plusieurs reprises qu'il n'avait pas l'intention de concurrencer Washington quant au nombre d'armes nucléaires.
Alexandre Lemoine
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