11.10.2022
La situation actuelle est plus dangereuse que les événements d'il y a 60 ans, de ceux qui ont eu lieu durant la déjà grave crise de Cuba. Les prédictions sur la probabilité croissante d'une Troisième Guerre mondiale avec des armes nucléaires sont devenues plus fréquentes.
Aux Etats-Unis, de nombreuses personnes ne les ont pas prises au sérieux, croyant que tout cela se passait loin et ne les affecterait pas. Mais, après le dernier discours de Volodymyr Zelensky où il a parlé de la nécessité d'une frappe nucléaire préventive sur la Russie, non seulement le public, mais aussi les personnes au pouvoir se sont inquiétées. Le monde est de nouveau face à une Crise cubaine 2.0?
Ainsi, le président américain, Joe Biden, a rappelé la précédente crise de ce genre, dite cubaine. Les événements mentionnés ont eu lieu, il y a exactement 60 ans en octobre 1962. Alors, le monde était vraiment au bord d'une catastrophe nucléaire. Cela a été évité. Actuellement, les observateurs reviennent sur ces événements non seulement par intérêt pour l'histoire, mais aussi pour voir s'il est possible d'utiliser la même stratégie d'alors pour dégonfler le conflit à l'heure actuelle. Mais, il sera très difficile de le faire pour diverses raisons. Les situations sont considérablement différentes.
L'URSS et les Etats-Unis étaient, alors, en état de guerre froide, menant deux blocs opposés irréconciliables luttant pour répandre leur idéologie et leur influence. Ils ont essayé, dans le même temps, de ne pas entrer dans une confrontation militaire directe. En octobre 1962, des événements se sont produits qui auraient pu conduire le monde à une véritable guerre nucléaire. Les Etats-Unis ont déployé leurs missiles à tête nucléaire dans certains pays européens et en Turquie. Nikita Khrouchtchev, en réponse, a décidé de faire de même à Cuba, mais à Washington, cela a été considéré comme une menace existentielle.
Des centaines de livres ont été écrits sur cette période historique, comme des milliers d'articles recensant les moindres détails de ces événements. L'essentiel est de marteler ici que la guerre a été évitée puisque les deux puissances nucléaires ont compris l'entière responsabilité de leurs décisions.
Le Wall Street Journal a récemment publié un article, Leçons durables de la crise des missiles de Cuba. Dans cet article, tout affirmant que John Fitzgerald Kennedy a sauvé le monde d'une guerre nucléaire, le quotidien américain invite ses lecteurs à se poser la question afin de savoir quelles leçons pouvons-nous tirer de ce qui s'est passé il y a 60 ans?
Force est de constater que nous ne pouvons pas en dire autant de l'actuel président américain et de son entourage. John Fitzgerald Kennedy et Nikita Khrouchtchev ont réussi à trouver un compromis. L'URSS a retiré ses missiles de Cuba et les Etats-Unis de la Turquie et de l'Italie, ce qui a soulagé le monde. Malheureusement, la situation est beaucoup plus dangereuse maintenant, puisque quelques mois avant le déclenchement des hostilités, Vladimir Poutine a envoyé à Joe Biden des propositions précises de garanties mutuelles de sécurité qui ont été rejetées. Le président des Etats-Unis n'a rien offert en retour, sauf la menace de sanctions catastrophiques pour la Russie.
Un point encore plus important est la différence entre les objectifs de Washington d'hier et d'aujourd'hui. A l'époque de John Fitzgerald Kennedy, il s'agissait de la rivalité entre les deux pays. Aujourd'hui, nous avons un Joe Biden qui parle directement de la nécessité d'affaiblir la Russie. Certaines personnalités influentes situées dans son entourage déclarent, également, son démembrement proche. Et, l'Ukraine, dans leurs plans, est utilisé comme un tremplin stratégique pour atteindre ces objectifs.
Il est intéressant de signaler que les Etats-Unis, pour une raison quelconque, ne parlent toujours que d'armes nucléaires tactiques, préférant ne pas mentionner l'existence d'une arme stratégique capable d'atteindre les Etats-Unis.
L'establishment américain insiste pour poursuivre la politique actuelle. Mais, les gens sont de plus en plus mécontents de ce qui se passe. De récents sondages montrent que les Américains commencent à se lasser du conflit en Ukraine. Près de la moitié des personnes interrogées ont déclaré qu'elles étaient opposées à l'envoi d'une aide militaire à Kiev. Ils préfèrent voir les Etats-Unis être impliqués dans des efforts diplomatiques pour résoudre le conflit. «La part des adultes américains qui sont extrêmement ou très préoccupés par une défaite ukrainienne a diminué de 17 points de pourcentage depuis mai, passant de 55% à 38 % aujourd'hui», rapportait le Pew Research Center le 22 septembre dernier. «Seuls environ deux Américains sur dix (18%) disent maintenant que les Etats-Unis ne soutiennent pas suffisamment l'Ukraine dans le conflit. Cela représente un changement radical par rapport au début de la guerre: en mars, juste après le début du conflit, 42% ont déclaré que les Etats-Unis ne fournissaient pas suffisamment de soutien», relatait le même centre.
Les voix de ceux, qui réalisent le danger de la politique de la Maison Blanche pour le pays, se font de plus en plus entendre. A titre d'exemple, il y a une lettre ouverte du colonel et ancien sénateur de l'Etat de Virginie, Richard Black, au Congrès américain datée du 27 septembre 2022 mettant en garde sur le risque nucléaire avec l'Ukraine. «Je suis troublé par les propos vagues sur le lancement d'une attaque nucléaire contre la Russie. De temps à autre, de hauts responsables républicains et démocrates ont suggéré d'employer de telles armes. Cela semble être un effort délibéré pour acclimater les Américains à l'idée de la guerre nucléaire», commence-t-il sa lettre. «Il n'y aurait pas eu de guerre si nous n'avions pas renversé le gouvernement démocratiquement élu d'Ukraine en renversant violemment le président Ianoukovitch en 2014. Nous avons promu la guerre en inondant ensuite l'Ukraine de livraisons massives d'armes», accuse-t-il en soulignant que «les mondialistes nous [font avancer] sans relâche vers cet Armageddon nucléaire».
Insistant sur la lourde responsabilité de l'Occident, il lance: «Les Etats-Unis auraient pu parvenir à la paix en pressant simplement l'Ukraine de mettre en œuvre les accords de Minsk de 2014 qu'elle avait signés, établissant un cadre clair pour régler pacifiquement les questions en suspens»; «L'Otan avait amplement l'occasion de faire la paix mais a délibérément choisi la guerre». «La guerre nucléaire est impensable; la paix est la meilleure ligne de conduite. Considérez-le s'il vous plaît».
Malheureusement, avec la composition actuelle de l'administration et du Congrès de la Maison Blanche, il n'y a pas encore d'espoir de le repenser. Certains changements sont possibles avec la victoire des républicains aux prochaines élections au Congrès car ils ont parfois des voix plus raisonnables. Même, s'ils ne sont pas si nombreux sur les questions de politique étrangère.
Arriverons-nous à l'élection présidentielle américaine de 2024 sans guerre nucléaire? Voilà la grande question!
Olivier Renault
Les opinions exprimées par les analystes ne peuvent être considérées comme émanant des éditeurs du portail. Elles n'engagent que la responsabilité des auteurs
Abonnez-vous à notre chaîne Telegram: https://t.me/observateur_continental