18.07.2023
Après le sommet de l’Otan à Vilnius, les responsables ukrainiens ont la crainte de voir l’Occident les laisser tomber au profit d’un arrangement avec la Russie. Les demandes en armes et les critiques de Kiev agacent l’Occident et en premier lieu les Etats-Unis. Selon Politico, le vent serait en train de tourner du côté de l’Alliance atlantique au désavantage du président ukrainien, Volodymyr Zelensky, surtout que la contre-offensive ukrainienne fait l’effet d’un pétard mouillé pour Washington et les principaux membres historiques de l’Otan.
L’Ukraine bientôt lâchée par les Etats-Unis? «Le décalage entre la rhétorique et l'action ronge les responsables ukrainiens et ajoute à leur peur que l'Occident essaie finalement de leur imposer un accord [avec la Russie]. D'où les demandes croissantes et incessantes de plus d'armes et de munitions, d'avions de guerre et de missiles - cela témoigne de leur inquiétude que leurs sacrifices et leurs souffrances, le sang déjà partagé, seront vains», annonce Politico. «Et avec la contre-offensive embourbée, l'inquiétude ukrainienne est que l'Occident perde patience et décide finalement que le conflit ne peut pas être gagnée aux conditions complètes de Kiev», rajoute le média politique anglophone.
Politico rapporte que le comportement colérique de Volodymyr Zelensky n’est pas du tout apprécié par les responsables politiques au Royaume-Uni et aux Etats-Unis. «Que cela nous plaise ou non, les gens veulent voir un peu de gratitude», a déclaré Robert Wallace ministre de la défense britannique, interrogé sur la colère de Volodymyr Zelensky de ne pas avoir reçu d'invitation formelle à rejoindre l'Otan [au sommet de l’Otan à Vilnius], comme le fait savoir Politico, soulignant qu’ «il y a un an, les diplomates occidentaux manifestaient de l'irritation et disaient que le président ukrainien devrait modérer sa verve et ses supplications, sinon il risquait de déclencher une réaction publique et politique».
Politico s’étonne que «l'exaspération occidentale à l'égard de Kiev n'ait pas plus explosé en surface». Le point est là. Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, est en train d’être lâché par l’Occident. Les diplomates occidentaux craignaient qu'il ne risque d'éroder le soutien populaire et de saper l'unité du continent avec ses exigences incessantes en voulant toujours plus de guerre économique contre la Russie provoquant l’étranglement des gouvernements européens qui ne pouvaient livrer les armes à la vitesse qu'il le souhaitait. Le média politique anglophone note qu’ «en juin de l'année dernière, NBC News a rapporté que Joe Biden s'était emporté contre Volodymyr Zelensky lors d'un appel téléphonique au moment où le dirigeant ukrainien a commencé à énumérer toute l'aide supplémentaire qu’ il avait besoin alors que le président américain venait de lui annoncer une nouvelle aide d’un autre milliard de dollars pour l'assistance militaire». «La frustration occidentale n'a fait qu’augmenter depuis avec le comportement du président ukrainien, mais, publiquement, cela n’est pas encore montré».
Kiev nourrit un ressentiment envers l’Occident. «Le ressentiment ukrainien mijote, également, face à ce que Kiev considère comme un ralentissement de la part de l'Occident», assure Politico citant la déclaration du président ukrainien quand ce dernier a qualifié d'«absurde» l'omission d'un calendrier pour l'adhésion de l'Ukraine à l'Otan, ce qui a entraîné la remarque de Robert Wallace. Pour Kiev, les craintes occidentales de voir une escalade -l'une des raisons du refus de certains systèmes d'armes- sont déplacées. Selon Politico, «les responsables ukrainiens rejettent les menaces nucléaires russes, les considérant comme vides de sens et visant uniquement à effrayer les pays occidentaux».
Politico note aussi qu’il se forme une fissure au sein des pays de l’Alliance atlantique. La Pologne et les États baltes soutiennent l’effort de guerre de l’Ukraine alors que les autres pays, qui sont depuis longtemps dans l’Otan, ont un autre avis et «cela fait partie du problème à l'origine des accusations d'ingratitude et de ressentiment ukrainien». «Alors que les Ukrainiens, les États baltes et la Pologne craignent la propagation vers l'ouest de la menace russe dans les décennies à venir, les Européens de l'Ouest et du Sud ne partagent pas cette crainte», rajoute le média politique anglophone.
Pour le point de vue ukrainien, «la victoire totale, la restauration de toutes les terres ukrainiennes occupées par la Russie, y compris la Crimée illégalement annexée» sont l’objectif. «Les négociations pourraient bien mettre fin à la guerre, mais il ne peut y avoir de conditions russes et les conditions de paix seront dictées par un Kiev victorieux», rappelle Politico qui informe que l'Occident se contenterait d'une victoire partielle où la Russie pourrait garder la Crimée et certaines parties du Donbass. «La victoire totale ne peut vraiment arriver que si l'armée ukrainienne marche vers Moscou - et cela ne se produit tout simplement pas», constate le média politique anglophone: «Bref, ce à quoi nous assistons est un affrontement entre praticité et idéalisme».
L’Occident est inquiet de voir l’attitude du président ukrainien et de lire la déclaration du commandant en chef de l'Ukraine, Valeri Zaloujny, cité par Politico, au Washington Post au moment où Kiev exige des F-16: «Pour sauver mon peuple, pourquoi dois-je demander à quelqu'un la permission de faire quoi que ce soit sur le territoire ennemi?»
«Volodymyr Zelensky n'est pas très à l'écoute de l'humeur du public et de la façon dont elle peut rapidement changer en Europe occidentale et méridionale où les ménages et les entreprises s'inquiètent de la façon dont ils vont survivre», avertit Politico, pointant du doigt «l’aggravation du coût de la vie exacerbée par les sanctions énergétiques imposées à la Russie et la flambée de l'inflation liée à la pandémie» sur les populations occidentales.
Olivier Renault
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