27.10.2023
La Chine a mis à l'eau ses premiers sous-marins nucléaires lanceurs de missiles de croisière (SSGN), selon le dernier rapport du département de la Défense des États-Unis sur les forces armées de la deuxième plus grande économie du monde.
Cela donne à Pékin la capacité de mener des attaques maritimes à grande échelle, autrefois la prérogative des sous-marins américains et russes, rapporte l'agence Reuters.
Le rapport du Pentagone, publié la semaine dernière, est la première confirmation évidente que les sous-marins observés dans les chantiers navals chinois au cours des 18 derniers mois sont des bâtiments d'attaque équipés de missiles guidés de type 093B.
En mai 2022, des images satellites du chantier naval de Huludao, dans le nord-est de la Chine, ont montré un sous-marin d'une nouvelle classe ou modernisée, avec des tubes verticaux pour le lancement de missiles de croisière. Selon le rapport du Pentagone, à court terme, les forces navales chinoises "auront la capacité de mener des frappes de haute précision à grande distance sur des cibles terrestres à partir de sous-marins et de navires de surface, en utilisant des missiles de croisière d'attaque au sol, ce qui augmentera considérablement les capacités de la Chine en matière de projection de puissance".
Les sous-marins nucléaires polyvalents lanceurs de missiles de croisière ont été développés par l'URSS pendant la guerre froide, en partie pour attaquer des porte-avions américains. Parallèlement, la marine américaine a conçu sa propre version de sous-marins d'attaque, porteurs de missiles de croisière Tomahawk.
Les missiles de croisière sont généralement des armes de haute précision à longue portée qui, contrairement aux armes balistiques, volent à basse altitude ou glissent pratiquement sur la surface de la mer. En 2011, le sous-marin USS Florida de la marine américaine a lancé 93 Tomahawk contre la défense aérienne de la Libye, ce qui était la première frappe opérationnelle d'un sous-marin américain et un évènement que a certainement été étudié attentivement par les stratèges chinois, compte tenu de la possibilité d'un affrontement armé direct avec Washington à cause de Taïwan.
Certains analystes supposent que la marine de la Chine cherchera à utiliser ses sous-marins comme une arme supplémentaire contre les porte-avions américains, ainsi que comme bâtiments maritimes pour mener des attaques au sol, permettant des frappes de missiles à une bien plus grande distance que les flottes de sous-marins d'attaque plus petits.
Le rapport du Pentagone indique que trois nouveaux sous-marins chinois pourraient être mis en service l'année prochaine dans le cadre d'une expansion plus large de la flotte sous-marine de la Chine, tant nucléaire que diesel, qui pourrait compter jusqu'à 65 bâtiments d'attaque en mer d'ici 2025.
Ces derniers temps, on constate une course aux armements sous-marins croissante dans la région Asie-Pacifique et d'autres régions de l'océan mondial, car la Chine construit une nouvelle génération de sous-marins avec des armements nucléaires dans le cadre de ses forces de dissuasion en développement, note l'agence britannique.
Collin Koh, un chercheur en sécurité de Singapour, souligne que les sous-marins nucléaires lanceurs de missiles de croisière représentent une nouvelle capacité de frappe importante pour la marine chinoise. Compte tenu de leur armement principal sous forme de missiles de croisière, "cela leur permettra potentiellement de mener des frappes massives contre des cibles terrestres et navales à distance", dit-il, ce qui compliquera les calculs stratégiques des rivaux de la Chine.
"Je pense que les Chinois ont tiré des leçons de l'expérience russe dans leur utilisation pour menacer les porte-avions américains: les SSGN permettent de mener des frappes à distance, contrairement à un sous-marin d'attaque typique qui a un choix d'armement plus limité, et c'est un véritable avantage", conclut l'analyste.
Une étude discutée au Naval War College des États-Unis en mai de cette année a montré que la Chine était proche d'une percée non seulement pour augmenter la puissance de frappe de ses sous-marins nucléaires, mais aussi pour les rendre beaucoup plus silencieux et furtifs pour éviter d'être détectés par les États-Unis et leurs alliés.
Alexandre Lemoine
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