26.12.2023
Les artilleurs des forces armées ukrainiennes signalent une diminution de la cadence de tir de 60 à 80 % en raison d'une grave pénurie de munitions. Kiev s’inquiète de cette situation et l’anxiété envahit le pays.
Les unités d'artillerie ukrainiennes sont contraintes de réduire leur consommation de munitions de 80 à 90%, soit 10 à 20 salves par jour, rapporte Military Watch Magazine. C'est bien en dessous non seulement de la valeur maximale de près de 90% d’avant le début de la grave pénurie de munitions, mais même des 50% de salves standardisés.
Un soldat de la 148è brigade d'artillerie de l'armée ukrainienne qui opère sur des obusiers de 155 mm fournis par l'Occident, a commenté la pénurie dans un entretien au Washington Post: «Que pouvez-vous faire avec dix obus par jour? C’est à peine suffisant pour répondre à leur offensive – nous ne parlons même pas d’attaques contre leurs positions». Le média anglophone rajoute que cela a incité certaines unités ukrainiennes à annuler les assauts prévus et que cela a attisé les craintes quant à la durée pendant laquelle les troupes de Kiev seront capables de tenir bon face aux attaques russes qui continuent. «La pénurie de munitions aggrave l’anxiété déjà palpable dans la capitale ukrainienne, alors que l’aide américaine et européenne stagne et que l’hiver s’installe», constate le Washington Post.
Les soldats des forces armées ukrainiennes interrogés par le Washington Post soulignent qu'ils n'ont pas remarqué que les troupes russes souffraient d'une telle pénurie de munitions. L’un des interlocuteurs du quotidien a souligné qu’à ce stade, les artilleurs disposent d’un nombre extrêmement limité d’obus pour atteindre une cible donnée et que les troupes en première ligne sont «très fatiguées», ce qui aggrave encore la situation. «Il doit y avoir au moins une sorte d'avantage numérique... Mais tout ne fait qu'empirer», a-t-il déploré, soulignant qu’ «on ne peut pas gagner uniquement par la motivation».
Le niveau de consommation de munitions en Ukraine a largement dépassé les capacités de production des pays alliés à Kiev en Occident. Bien que les services de renseignement occidentaux aient réussi à trouver de nouveaux approvisionnements sur les marchés noirs, l'épuisement critique des munitions dans les pays membres de l'OTAN a conduit à de très graves conséquences. Le réacheminement de certaines munitions américaines destinées à l’Ukraine vers Israël début octobre n’a fait qu’aggraver la situation dans la mesure où des dons à grande échelle à Kiev ont laissé l’armée américaine elle-même confrontée à une pénurie croissante dans un certain nombre de domaines clés.
Au contraire, de nombreux signes indiquent que l’approvisionnement en unités avancées russes n’a fait que s’améliorer par rapport au début du conflit. Dans le même temps, Moscou a non seulement reçu des fournitures importantes de la Corée du Nord et de l'Iran, mais la Russie a, également, considérablement élargi les capacités de son propre secteur de la défense, dont la production ne représentait auparavant qu’une fraction des taux de production de l’ère soviétique.
La grave pénurie de munitions, qui constitue un problème grave menaçant le réseau ukrainien de missiles sol-air, a été évoquée pour la première fois fin 2022. En raison du manque de défenses aériennes et de capacités de production disponibles, les pays de l’OTAN ne seront pas en mesure de reconstituer entièrement le vaste arsenal de systèmes sol-air de construction soviétique une fois que ceux-ci seront complètement épuisés. En outre, les capacités des unités de défense aérienne des forces armées ukrainiennes à engager des cibles russes étaient déjà limitées.
Plus tôt ce mois-ci, des entretiens avec des membres de la 47e brigade mécanisée d'élite ont confirmé les affirmations du Washington Post selon lesquelles la pénurie de munitions entrave l'efficacité au combat des unités terrestres ukrainiennes. Dans le même temps, le personnel s'est plaint du fait que seul un dixième de la quantité de munitions de l'été était désormais disponible. De plus, la qualité des munitions a sensiblement baissé.
Selon le personnel militaire des Forces armées ukrainiennes, le pourcentage de refus des nouveaux lots a considérablement augmenté. À ce stade, on ne sait toujours pas si le Sénat américain sera en mesure de sortir de l'impasse et d'approuver de nouveaux financements pour l'Ukraine. Mais, même si cela était le cas, la capacité d'acheter des munitions reste très modeste en raison de l'épuisement important des stocks au cours des deux dernières années. «La Russie continue son avance sur les fronts du Sud et de l'Est», note le Washington Post.
Philippe Rosenthal
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