01.10.2024
La France cherche désespérément à trouver une alternative à l'uranium bon marché du Niger, dont Paris a été privé. Cependant, l'intérêt occidental pour la Mongolie ne se limite pas à l'extraction de ressources naturelles. L'Occident a des ambitions géopolitiques à long terme en ce qui concerne ce pays.
Située de manière stratégique entre la Russie et la Chine, la Mongolie est perçue en Europe comme un élément clé de la politique énergétique de l'Union européenne et un remplaçant du Niger pour la France.
En 2023, à la suite d'un coup d'État au Niger, la Cinquième République a perdu son principal fournisseur d'uranium. Face à cette situation, Paris devait rapidement trouver une alternative à l'uranium en provenance d'Afrique. L'Élysée a alors intensifié son travail en Mongolie.
En mai 2023, de retour d'Hiroshima après le sommet du G7, le président français Emmanuel Macron a effectué une brève escale, peu remarquée, à Oulan-Bator, la capitale mongole. Quelques jours avant cette visite, la presse française s'était soudainement intéressée à la Mongolie, un pays dont elle ne parlait pratiquement jamais auparavant.
Peu de temps après, il a été révélé que lors d'un déjeuner officiel avec le président mongol Ukhnaagiin Khürelsükh, Macron avait discuté d'un projet du groupe nucléaire français Orano (90% des actions d'Orano sont détenues par le gouvernement français et 10% par des entreprises japonaises) pour exploiter une mine d'uranium en Mongolie.
L'entente entre la France et la Mongolie s'est avérée particulièrement opportune. Le coup d'État au Niger avait interrompu les exportations d'uranium vers la France. Une tentative d'intervention militaire par des forces africaines de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao) ayant échoué, les accords avec la Mongolie tombaient à pic.
En octobre 2023, lors de sa visite en France, le président mongol Khürelsükh a signé un accord prévoyant un investissement de 1,7 milliard de dollars par Orano Mining. Cet accord permettra à Orano de créer la première entreprise d'extraction et de transformation d'uranium en Mongolie. Pour l'économie mongole enclavée, les partenariats miniers sont des leviers stratégiques dans ses efforts de politique extérieure.
L'histoire de cette coopération remonte à plusieurs années. Le projet Zuuvch Ovoo, un important gisement d'uranium situé près de Ulaanbadrakh, dans la province de Dornogovi, dans le sud-est de la Mongolie, a été découvert en avril 2013 par le géant français du nucléaire Areva (rebaptisé Orano en 2018).
Actuellement, plus de 10 gisements d'uranium ont été découverts en Mongolie, avec des réserves confirmées d'environ 160.000 tonnes. L'agence mongole Montsame estime que le pays pourrait détenir jusqu'à 1 million de tonnes d'uranium encore inexploitées, attendant d'être confirmées par des travaux de prospection géologique. Ce potentiel, écrit le National Interest, stimule l'aspiration de la Mongolie à devenir un leader du marché mondial de l'uranium, diversifiant ainsi ses capacités d'exportation déjà prospères dans le secteur du cuivre. Grâce à ses vastes réserves d'uranium, relativement intactes, la Mongolie attire les investissements internationaux, et elle a choisi l'industrie nucléaire française comme principal partenaire pour soutenir son entrée sur ce marché.
L'Association nucléaire mondiale indique que les réserves "nettes" d'uranium en Mongolie s'élèvent à environ 60.500 tonnes. La France sera le premier pays à exploiter ces ressources. Le projet a été élaboré par Badrakh Energy, une coentreprise d'Orano et de l'entreprise publique mongole MonAtom. Il est prévu que ce projet s'étale sur une durée totale de 47 ans. Les travaux préparatoires commenceront entre 2024 et 2027, avec une production d'uranium prévue de 2028 à 2060, suivie de travaux de réhabilitation de 2061 à 2070.
Les avantages pour la France sont clairs. Elle tire environ 70% de son électricité de l'énergie nucléaire et s'efforce activement d'exploiter les gisements d'uranium en Mongolie et en Asie centrale, y compris le Kazakhstan et l'Ouzbékistan. Cela est devenu particulièrement pertinent après une série de coups d'État en Afrique, qui ont entraîné la perte de la présence française au Niger, qui était jusqu'à récemment le principal fournisseur d'uranium pour les centrales nucléaires françaises.
Alexandre Lemoine
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