04.10.2024
Le 2 octobre, le Premier ministre britannique Keir Starmer s'est rendu à Bruxelles pour son premier entretien officiel avec la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. Lors de cette rencontre a été évoqué la relance des relations entre l'UE et le Royaume-Uni annoncée plusieurs fois déjà par les travaillistes. La révision de l'accord de coopération suscite de nombreux débats au sein du gouvernement britannique ainsi que parmi les États membres de l'UE.
Pour Keir Starmer, dont la cote de popularité continue de baisser, il est crucial de tenir sa promesse électorale et de minimiser les conséquences négatives du Brexit.
La déclaration publiée à l'issue de la rencontre, parle sans surprise de la volonté du Royaume-Uni et de l'UE de lutter ensemble contre les défis mondiaux et de coopérer plus étroitement dans des domaines tels que l'économie, la concurrence géopolitique, la migration illégale et le changement climatique. Parmi les défis communs, le conflit russo-ukrainien a été mis en avant, il serait à l'origine du changement du "contexte stratégique". Les deux interlocuteurs sont convenus de se rencontrer à nouveau en automne afin de poursuivre les discussions.
Le seul résultat substantiel de ces négociations a été l'accord sur la tenue régulière de sommets au niveau des dirigeants de l'UE et du Royaume-Uni. Les médias avaient déjà fait état de cette initiative en juillet, peu après l'arrivée au pouvoir des travaillistes.
"Je suis fermement convaincu que le public britannique souhaite revenir à un leadership pragmatique et raisonnable dans nos relations avec nos voisins les plus proches, pour faire fonctionner le Brexit et agir dans leur intérêt, afin de stimuler la croissance économique, renforcer notre sécurité et relever les défis communs", a expliqué Keir Starmer en annonçant ces sommets lors d'une conférence de presse après sa rencontre avec Ursula von der Leyen.
Le premier sommet, jugé nécessaire pour "suivre l'évolution des relations", devrait avoir lieu début 2025.
Avant sa visite, Keir Starmer avait déclaré qu'il était déterminé à "établir des relations plus matures" avec l'UE plusieurs années après le Brexit. L'objectif principal des négociations lancées le 2 octobre est de réviser l'accord de commerce et de coopération entre l'UE et le Royaume-Uni signé en 2020. Starmer l'a qualifié de "mauvais accord ramené par Boris Johnson" (Premier ministre britannique de 2019 à 2022). Cet accord, dont la prolongation est prévue en 2026, inclut notamment la liberté du commerce de biens, un accès mutuel limité aux marchés des services, ainsi qu'une coopération dans le commerce des ressources énergétiques.
Les travaillistes plaident également pour la conclusion d'un pacte de défense entre Londres et Bruxelles visant à renforcer la sécurité collective et le Fonds européen de défense (FED). Un tel accord permettrait au Royaume-Uni de participer aux initiatives européennes en matière d'achats de défense dans le cadre du FED.
Keir Starmer a précisé que cet accord n'excluait pas la coopération avec l'Otan. Il a souligné que la collaboration avec l'Alliance atlantique restait prioritaire pour Londres en matière de défense, et qu'un accord avec l'UE constituerait un bon complément.
Comme l'a rapporté le Financial Times, les premières étapes des négociations porteront principalement sur le développement des canaux de communication entre les services de sécurité et la police pour l'échange d'informations. Sachant que Bruxelles continue de débattre de la manière d'intégrer les entreprises britanniques de défense dans le programme de réarmement de l'UE. Selon des sources du Financial Times, certains pays, notamment la France, estiment que l'Union européenne doit concentrer ses investissements sur ses propres entreprises. Andrius Kubilius, le nouveau commissaire européen à la défense, plaide pour l'inverse, affirmant que "le Royaume-Uni fait toujours partie de l'Europe".
Un diplomate européen anonyme a déclaré à Politico que l'Union européenne souhaitait tirer parti de l'intérêt manifeste des travaillistes pour la coopération, mais que cela ne suffisait pas pour la relance des relations: des "actions concrètes" sont nécessaires de la part de Londres.
Les sources du Financial Times ont également exprimé leur frustration face au manque de clarté dans les discussions: "Le Royaume-Uni doit nous dire clairement ce qu'il veut."
Interrogé sur la compatibilité des "lignes rouges" du gouvernement avec la volonté de relancer les relations avec l'UE, Keir Starmer a répondu: "Il n'y aura pas de retour à la liberté de circulation, au marché unique ou à l'union douanière, mais nous trouverons des moyens constructifs de travailler ensemble dans l'intérêt du peuple britannique." Il a reconnu que "ce chemin sera semé d'embûches", mais a assuré que les parties parviendraient à des "résultats constructifs".
La rencontre entre Keir Starmer et Ursula von der Leyen marque le début d'un important processus de négociations durant lequel le Premier ministre britannique devra jongler entre les concessions envers la Commission européenne et la défense des intérêts nationaux, y compris la position de son propre gouvernement. Depuis son entrée en fonction en juillet, Starmer a souligné que le Brexit avait donné aux Britanniques un sentiment d'isolement et que les travaillistes étaient déterminés à y remédier.
Alexandre Lemoine
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