"Un monde où certaines régions sont devenues invivables. Cela ressemblait longtemps à une dystopie lointaine. Mais la catastrophe commence déjà, comme peuvent le voir les habitants de la côte Ouest des Etats-Unis. Quelles seront les conséquences?", s'interroge la revue allemande Der Spiegel.
L'enfer sur la côte Ouest des Etats-Unis réussit ce que Greta Thunberg avait échoué à faire. A l'âge de 16 ans, il y a 20 mois, elle voulait que le monde soit épris de peur: les chefs de multinationales, les dirigeants, tout le monde doivent "céder à la panique" à cause des changements climatiques, exigeait-elle au Forum économique mondial de Davos. Cependant, les responsables n'éprouvent toujours pas la peur voulue par Greta Thunberg. Le discours de la plupart de chefs d'Etat sur la crise ne laisse percevoir aucune inquiétude quant à l'avenir – ils admettent sciemment une fin du monde.
"Les incendies en Californie, en Oregon et à Washington pourraient éliminer le principal obstacle dans la lutte contre la crise climatique: son invisibilité. Le réchauffement climatique montre son terrible visage. Il était déjà perceptible pendant la canicule en Europe l'an dernier et les incendies dévastateurs en Australie", écrit la revue.
"C'est un indicateur clair du changement climatique. C'est un signal pour nous tous que nous devons tout faire pour lutter contre le réchauffement climatique", a déclaré Kate Brown, gouverneure de l'Etat de l'Oregon sérieusement touché. Selon elle, 500.000 ha de terrain ont brûlé en Oregon depuis dix ans, et rien que la semaine dernière 1 million d'hectares a brûlé.
En Californie, des dizaines de milliers d'habitants observent de leurs propres yeux comment le changement climatique déclenchant des incendies rend inhabitable leur milieu de vie. Aucun incendie n'a été directement provoqué par une concentration élevée de CO2 dans l'atmosphère, mais le changement climatique crée et aggrave les conditions de plus en plus notables pour leur déclenchement. De la hausse du risque d'incendies de forêt suite aux changements climatiques témoigne notamment le rapport du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC). Selon lui, la saison des incendies de forêt augmente "très probablement" avec un réchauffement jusqu'à 1 degré.
De plus, le GIEC a rapporté que dès aujourd'hui les périodes de sècheresse augmentaient dans les régions déjà sèches, notamment en Méditerranée ou en Californie. Plusieurs régions de l'Ouest des Etats-Unis ont connu cette année une canicule record, le mois d'août le plus chaud de toute l'histoire des observations a été enregistré en Californie. A cela s'ajoute l'extrême sècheresse dans les Etats frappés par les incendies. "La saison des incendies a augmenté en Californie jusqu'à 75 jours", déclare Lynette Round, représentante du ministère californien de la Forêt et de la Prévention des feux.
"Ces dernières années nous sommes entrés dans une nouvelle phase de crise climatique. La Terre s'est déjà réchauffée de plus d'un degré par rapport à l'époque préindustrielle. Les modèles, les statistiques et les pronostics se transforment en incendies, en inondations et en ouragans. Si nous ne stoppons pas rapidement les émissions de CO2 dans l'atmosphère, en 2070 déjà près de 3,5 milliards de personnes vivront probablement dans les régions où la température moyenne ne permettra pas de survivre – avec une population mondiale attendue à hauteur de 10 milliards de personnes cela pourrait affecter un tiers de l'humanité", écrit la revue.
Empêcher que la dystopie devienne réalité est une tâche extrêmement difficile. L'économie, la politique, des sociétés entières et chaque individu à part doivent changer. Mais nous pouvons commencer par le plus évident. Selon le Fonds monétaire international, rien qu'en 2015 les subventions gouvernementales pour les hydrocarbures ont atteint la somme exorbitante de 4.700 milliards d'euros. Selon l'Agence internationale pour les énergies renouvelables, le passage de l'approvisionnement en électricité de la planète aux sources d'énergie renouvelable d'ici 2050 coûterait seulement 405 milliards d'euros par an. Les dirigeants mondiaux en place ne doivent pas céder à la panique, ils doivent garder leur calme et agir correctement. Aussi cynique que cela paraisse, la catastrophe actuelle pourrait y contribuer.
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