Selon l'Organisation des Nations unies, d'ici 2050, la population de la Terre augmentera jusqu'à 9,7 milliards d'habitants. La hausse de la population terrestre s'accompagne d'autres processus qui ne sont pas très rassurants. Le système écologique de notre planète n'est pas adapté à un tel nombre d'habitants et encore moins à son traitement complètement barbare par les humains. Les ressources naturelles de la Terre fondent avec une rapidité alarmante, et une superficie de plus en plus grande de la planète devient complètement inhabitable.
D'après les meilleurs spécialistes en matière d'environnement (les vrais scientifiques, pas les politiques qui font carrière sur l'écologie), très bientôt ce n'est pas les métaux précieux ni même le pétrole ou le gaz qui auront le plus de valeur. C'est l'eau, l'eau ordinaire, sans laquelle aucun individu ne peut survivre, qui devient aujourd'hui non seulement une source déficitaire, mais même un objet de convoitise des pays qui sont prêts à aller jusqu'à une guerre pour l'obtenir.
Par exemple, le conflit entre l'Egypte et l'Ethiopie qui risque de dégénérer en affrontement armé est dû à l'intention de cette dernière de construire un immense barrage en amont du Nil afin d'électrifier et d'industrialiser le pays. Le Caire considère la mise en œuvre de ce projet comme une condamnation à mort et il est prêt à déclencher une guerre pour l'eau du Nil. Les Turcs risquent également d'entrer en conflit avec les voisins s'ils continuaient d'ériger des digues sur le Tigre et l'Euphrate.
Tous les problèmes actuels, à en juger par les pronostics des chercheurs, terniront sur fond de pénurie critique d'eau potable qui attend l'humanité au milieu du siècle. Selon les estimations des analystes de l'Onu, d'ici là ce fardeau affectera plus de 6 milliards de personnes, soit presque deux tiers de la planète. Le nombre de victimes potentielles dans une telle situation est très difficile à calculer. Car l'absence d'eau ne tue pas seulement par la soif. Elle conduit à la famine, car dès à présent l'agriculture est impossible sans irrigation dans plusieurs régions du monde, sachant que leur nombre grandit inéluctablement.
Une autre conséquence de la pénurie d'eau se traduit par l'apparition de maladies et d'épidémies qui surviennent forcément dans les zones surpeuplées rencontrant des problèmes d'alimentation en eau. Selon les normes médicales contemporaines, un individu a besoin de 50 litres d'eau par jour. Avec un "seuil" minimal de 30 litres. Dont 5 sont nécessaires pour boire et cuisiner (il faut boire 1,5-2 litres d'eau par jour pour un fonctionnement normal de l'organisme), et les 25 restants pour les besoins d'hygiène.
Sinon le prix à payer est très lourd, car c'est l'insalubrité qui est la deuxième cause mondiale de la mortalité parmi les enfants – environ 2 millions mouraient chaque année à cause des maladies infectieuses intestinales il y a encore quinze ans. Ces statistiques ont-elles changé pour le mieux aujourd'hui? C'est très improbable. On ignore quelle nouvelle maladie pourrait surgir et se répandre à travers la planète dans ces conditions. Probablement une chose après laquelle le coronavirus passerait pour un léger désagrément.
L'eau, comme la plupart des ressources et bienfaits vitaux, est répartie très inégalement entre les gens. Les Américains en consomment 400 litres par jour sans songer à économiser. Les Européens consomment deux fois moins d'eau. Dans certaines régions d'Afrique et d'Asie centrale la norme de consommation d'eau potable même de 5 litres par jour reste un rêve inatteignable pour une grande partie d'habitants. Quels cataclysmes pourraient survenir à cause de tout cela?
Les foyers de guerres éventuelles pour l'eau susceptibles, avec la famine et les maladies, d'emporter des millions de vies pourraient se trouver dans le bassin du Jourdain, où l'hostilité israélo-arabe couplée à la soif risque de dégénérer en affrontement mortel pour 1% d'eau potable du monde située au Moyen-Orient avec ses 5% de la population mondiale. La Mésopotamie est une région tout aussi explosive. Une guerre risque également d'éclater pour les eaux du Tigre et de l'Euphrate que la Turquie cherche à contrôler de plus en plus. L'Afrique se trouve indéniablement dans la "zone à risques", notamment sa partie Nord, ainsi que l'Angola et la Namibie.
Sans l'ombre d'un doute, les guerres pour l'eau sont l'un des moyens les plus plausibles de l'autodestruction de tous les Terriens. Etant donné que dès à présent plusieurs pays dotés de l'arme nucléaire font face à une pénurie d'eau, la perspective qui se dessine est très alarmante.
D'une manière ou d'une autre, ce problème devra être réglé par des moyens et des méthodes pacifiques. Certains voient la solution dans l'adoucissement massif de l'eau de mer salée, d'autres - dans la "conquête" de l'Arctique et de l'Antarctique pour alimenter en eau tous les Terriens. Cependant, le plus important consiste probablement à renoncer à l'exploitation irréfléchie et prédatrice des ressources naturelles par l'humanité. De celles qui restent du moins…
Alexandre Lemoine
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