27.04.2022
Paris et Berlin ont envoyé discrètement des armes à Moscou pour de 273 millions d'euros, y compris des bombes, des roquettes et des missiles, qui sont probablement utilisés en Ukraine, vient de révéler The Telegraph sous la plume de Joe Barnes, un correspondant du quotidien britannique basé à Bruxelles. Le journaliste britannique a osé remonter la couverture sur les ventes d’armes des Occidentaux à la Russie. La presse britannique confirme l'article d'Observateur Continental de mars dernier.
«Ils ont envoyé du matériel, notamment des bombes, des roquettes, des missiles et des armes à feu, à Moscou malgré un embargo à l'échelle de l'UE sur les livraisons d'armes à la Russie», instauré à la suite du référendum de la Crimée en 2014, souligne The Telegraph.
La Commission européenne a été contrainte ce mois-ci de combler une lacune dans son blocus après avoir découvert qu'au moins 10 Etats membres avaient exporté près de 350 millions d'euros de matériel informatique vers la Russie. «Environ 78% de ce total ont été fournis par des entreprises allemandes et françaises», rapporte Joe Barnes.
1 milliard d'euros par jour à la Russie. Olaf Scholz, le chancelier allemand, a été vivement critiqué pour sa réticence à fournir des armes lourdes à l'Ukraine. Les efforts d'Emmanuel Macron pour négocier avec le président russe, Vladimir Poutine ont vu le président français être accusé d'apaisement. Paris et Berlin ont, tous les deux, résisté à une interdiction de l'UE d'acheter du gaz à la Russie, le bloc payant actuellement à Moscou 1 milliard d'euros par jour pour l'approvisionnement en énergie.
Le rapport de l'UE est apparu alors qu'un haut commandant russe, le général Roustam Minnekaïev, commandant adjoint des forces du district militaire central de la Russie, a déclaré que Moscou avait élargi ses objectifs pour prendre le «contrôle total» du sud de l'Ukraine, ainsi que de la région orientale du Donbass. «Les forces russes créeraient un pont terrestre vers la Crimée et pourraient pousser jusqu'à la frontière de la Moldavie», a-t-il rajouté.
A New Delhi, Boris Johnson a averti vendredi que la Russie pouvait encore gagner la guerre, annonçant son intention d'envoyer des chars britanniques en Pologne afin que l'Ukraine puisse recevoir les modèles T-72 de l'ère soviétique appartenant à Varsovie. Lorsqu'on lui a demandé si la Russie pouvait gagner la guerre en Ukraine, le Premier ministre britannique a reconnu qu'il s'agissait d'une «possibilité réaliste» et que Moscou était sur le point de s'emparer de Marioupol.
Vendredi, Vladimir Poutine, a déclaré à Charles Michel, le président du Conseil européen, que les soldats ukrainiens, enfermés dans l'usine sidérurgique Azovstal de la ville, seraient autorisés à vivre dès que des drapeaux blancs seront hissés à Azovstal. Pendant ce temps, Olaf Scholz, le chancelier allemand, justifie, comme l'indique Paris Match sa politique prudente en matière d'armements lourds par le souci d'éviter une confrontation directe entre l'Otan et la Russie, puissance nucléaire.
L'Allemagne vend des armes à la Russie. Les critiques se sont intensifiées lorsqu'il est apparu que des entreprises allemandes avaient utilisé une faille dans un embargo de l'UE sur les exportations d'armes vers la Russie, réalisant des ventes d'une valeur de 121 millions d'euros d'équipements «à double usage», y compris des fusils et des véhicules de protection spéciale, à Moscou.
Berlin a défendu son ambiguïté dans le blocus des armes de l'UE de 2014, insistant sur le fait que les marchandises n'ont été vendues qu'après que le Kremlin a garanti qu'elles étaient destinées à un usage civil plutôt qu'à une application militaire.
«S'il y avait des indications d'une quelconque utilisation militaire, les licences d'exportation n'étaient pas accordées», a ajouté un porte-parole du ministère de l'Economie du pays, précise The Telegraph.
La France a, également, été responsable de l'envoi de 152 millions d'euros vers la Russie, dans le cadre de 76 licences d'exportation. Paris a autorisé les exportateurs à remplir les contrats conclus avant 2014, en utilisant une technique de porte dérobée dans l'embargo de l'UE.
Outre les bombes, les roquettes et les torpilles, les entreprises françaises ont envoyé des caméras thermiques pour plus de 1 000 chars russes ainsi que des systèmes de navigation pour les avions de chasse et les hélicoptères d'attaque. Depuis, selon Moscou, le début du plan de dénazification mené le 24 février, l'UE a introduit de nouvelles restrictions sur l'exportation d'articles à double usage vers Moscou, supprimant ainsi l'échappatoire
Cependant, il a fallu à l'UE jusqu'à son cinquième paquet de sanctions, décrit comme le plus draconien jamais introduit par Bruxelles, jusqu'à ce que l'exemption sur les ventes d'armes précédemment convenues à la Russie soit supprimée. Ainsi, du 24 février au 8 avril, les ventes d’armes à la Russie ont pu continuer.
Joe Barnes explique que le gouvernement français n'a pas commenté son utilisation de l'exemption, mais a précédemment défendu la clause «grand-père». Ainsi, Observateur Continental, qui avait informé ses lecteurs en mars dernier que la France a discrètement équipé l’armée russe avec des technologies militaires dernier cri, apprend que l'échappatoire, finalement, fermée le 8 avril, n'a été fermée qu'après les protestations croissantes des Etats membres baltes et orientaux. Des envoyés de Pologne et de Lituanie ont veillé à ce que le texte de l'embargo sur les armes initial de 2014 soit modifié lorsqu'il est apparu que des armes continuaient d'affluer en Russie.
Selon les données de la Commission européenne, les pays de l'UE ont vendu l'année dernière des armes et des munitions à la Russie pour une valeur de 39 millions d'euros alors que le Kremlin se préparait à lancer son action de dénazification, selon Moscou, de l'Ukraine.
Tobias Ellwood, président du comité de défense de la Chambre des communes, a déclaré que tous les Etats membres de l'Otan devraient déclarer qu'ils n'enverraient pas d'armes à la Russie lors du sommet de l'Otan à Madrid en juin. «Si nous convenons que la Russie représente désormais une menace existentielle pour la sécurité européenne, alors aucun pays européen n'a d'excuse pour continuer à fournir des armes à la Russie», a-t-il déclaré, fait savoir le quotidien britannique. L'amiral Lord West of Spithead a déclaré: «Utiliser des échappatoires pour éviter l'embargo sur les armes de l'UE contre la Russie après l'invasion de la Crimée est en fait un crime et d'une stupidité à couper le souffle».
La France et l'Allemagne ont vendu discrètement des armes à Moscou. The Telegraph évoque une source européenne de haut niveau, sans la citer, qui a ajouté: «Il est temps que la France et l'Allemagne se réveillent et deviennent réelles». Cristian Terhes, l'eurodéputé roumain qui a partagé l'analyse de l'UE, a déclaré: «Alors que l'Ukraine réclame désespérément des armes pour se défendre contre l'invasion de Poutine, l'Allemagne et la France sont silencieuses, mais ont été assez heureuses pour vendre discrètement et honteusement leurs marchandises à Moscou».
Le rapport de l'UE fait suite à des enquêtes menées le mois dernier sur les pires contrevenants européens pour les exportations d'armes vers la Russie par Disclose et Investigate Europe, deux sites d'information d'investigation, rajoute Joe Barnes. Le journaliste britannique, en poste à Bruxelles, accentue sur sa découverte en indiquant qu’ outre l'Allemagne et la France, l'Italie était responsable de l'envoi d'armes d'une valeur de 22,5 millions d'euros à Moscou après l'imposition de l'embargo de l'UE, tandis que le Royaume-Uni a réalisé des ventes de 2,4 millions d'euros. L'Autriche, la Bulgarie et la République tchèque ont exporté entre 2015 et 2022 49,3 millions d'euros d'armes vers la Russie.
Olivier Renault
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