24.10.2022
La France entend se retirer du Traité sur la Charte européenne de l'énergie (TCE) afin d'accélérer la transition verte dans le secteur de l'énergie. C'est ce qu'a déclaré vendredi dernier le président français, Emmanuel Macron, lors d'une conférence de presse à l'issue du sommet européen de Bruxelles. Le TCE permet aux entreprises des énergies fossiles d’attaquer en justice les pays agissant contre le réchauffement climatique.
Atteindre le 100% tout électrique le plus rapidement possible. «Nous souhaitons opérer au plus vite la transition vers l'Europe en tant que continent 100% électrique. A cet égard, je voudrais dire clairement, ici, que la France a décidé de se retirer du Traité sur la Charte européenne de l'énergie (TCE)», a déclaré Emmanuel Macron. Le chef de l'Etat a déclaré qu'en particulier, après des négociations avec les premiers ministres espagnol et portugais, il avait été décidé d'abandonner la construction du gazoduc Midcat.
Au lieu de cela, il a été décidé de renforcer l'interconnexion à travers les réseaux d'énergie électrique. Il a également été décidé de «développer un corridor d'énergie verte» entre l'Espagne et la France. «A mon avis, cela nous permet d'atteindre les objectifs à court terme que la France s'était fixés plus tôt: réduire les prix de l'énergie et maintenir l'unité européenne. Je pense que ces décisions nous conduisent dans la bonne direction et nous permettent d'aborder en urgence les questions de notre compétitivité, ainsi que protéger notre économie. En outre, cela est conforme à nos objectifs plus larges de protection du climat, aux perspectives de réindustrialisation et à notre désir de souveraineté européenne», a déclaré Emmanuel Macron.
Le média écologiste Reporterre signalait que dès le 10 octobre les écologistes ont demandé «la sortie du fameux Traité qui protège les compagnies pétrolières». Ils ont également rappelé que l’Espagne, la Pologne et les Pays-Bas avaient annoncé ces dernières semaines leur volonté de se retirer du traité et que l’Allemagne l’envisageait également.
France Bleu rappelle que «le Traité sur la Charte de l'énergie a été signé en 1994 [entré en vigueur en 1998], à la fin de la Guerre froide, pour offrir des garanties aux investisseurs dans les pays d'Europe de l'Est et de l'ex-URSS» et que «cette convention visait à sécuriser l'approvisionnement de l'Europe de l'Ouest en énergies fossiles». Le média français souligne: «Réunissant l'Union européenne et 52 pays (d'Europe, d'Asie centrale, mais aussi la Turquie ou encore l'Australie), il permet à des entreprises de réclamer, devant un tribunal d'arbitrage privé, des dédommagements à un Etat dont les décisions affectent la rentabilité de leurs investissements, même lorsqu'il s'agit de politiques pro-climat».
Selon Reporterre «le Traité sur la Charte européenne de l'énergie permet aux entreprises des énergies fossiles d’attaquer en justice les pays agissant contre le réchauffement climatique».
Le Sénat soulignait qu' «un important sujet de désaccord entre l'Union européenne et la Russie concerne l'avenir du Traité sur la Charte de l'énergie», car, «en effet, l'Union européenne continue d'exiger de la Russie qu'elle ratifie le traité, alors que le gouvernement russe actuel s'est toujours refusé à prendre une telle mesure». Le Sénat rappelle que le Traité sur la Charte européenne de l'énergie «n' a pas été signé par d'autres pays producteurs, comme les Etats-Unis ou le Canada, et qu'il n'a pas été ratifié par la Norvège». Ce traité était déjà bancal car «la plupart des accords conclus au niveau européen bénéficient sur ce point d'une exemption de la part de la Commission européenne». Maintenant, c'est la France qui se retire du TCE, donnant raison à la Russie dans sa logique de n'avoir pas voulu le ratifier.
La décision de la France de quitter le TCE fait suite au profond mécontentement d’Emmanuel Macron de voir le chancelier allemand allouer des milliards d’euros pour soutenir l’énergie nationale. «Paris est furieux du lancement d’un programme d’aide à l’énergie domestique de 200 milliards d’euros en Allemagne sans consultation préalable avec son partenaire européen le plus proche [la France] et de sa préférence pour les armes américaines», rajoute le média anglophone. Les Français sont très en colère contre les Allemands, en particulier contre Olaf Scholz. Ils sont furieux», a même signalé The Telegraph citant une source diplomatique.
Comme Le Monde le rapporte, Jennifer Morgan, secrétaire d’Etat et représentante spéciale pour la politique climatique internationale auprès du ministère des affaires étrangères allemand, a effectué son premier déplacement officiel à Paris, jeudi 20 octobre pour répondre aux critiques sur la décision de l’Allemagne de recourir davantage au charbon et au gaz naturel liquéfié (GNL) pour produire de l’électricité dans le contexte de la guerre en Ukraine.
Pierre Duval
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