09.02.2023
Le tremblement de terre en Türkiye a conduit à un rapprochement avec les alliés occidentaux qui se sont empressés d'aider le président turc Recep Tayyip Erdogan. La catastrophe a permis d'atténuer les différends et de ne pas mentionner les scandales.
Après les appels du président américain Joe Biden et du secrétaire de l'Otan Jens Stoltenberg à soutenir leur allié en détresse, la Suède et la Finlande, qui n'ont pas encore pu intégrer l'Otan à cause des objections d'Ankara, font preuve d'une activité notable pour aider la Türkiye. De son côté, cette dernière envoie des signaux de disposition à approuver la demande de la Finlande. Le soudain refroidissement dans les relations turco-occidentales a cédé la place à la détente.
La plus grande catastrophe naturelle en Türkiye depuis 1939 a créé une nouvelle intrigue dans ses relations avec les puissances occidentales, qui, outre l'aide, règlent leurs objectifs géopolitiques. Les alliés occidentaux d'Ankara sont déterminés à montrer comment fonctionnent les mécanismes de solidarité transatlantique.
Le président américain Joe Biden était l'un des premiers à téléphoner à son homologue turc. "Le président Biden a confirmé la disposition des États-Unis à apporter toute l'aide nécessaire à notre allié de l'Otan, la Türkiye, en réponse à cette tragédie", indique un communiqué de la Maison Blanche.
D'après ce dernier, des groupes de spécialistes américaines "se déploient rapidement pour prêter assistance aux opérations de recherche et de sauvetage en Türkiye et coordonner l'aide qui serait nécessaire aux victimes des tremblements de terre".
Le conseiller du président à la sécurité nationale Jake Sullivan et le secrétaire d'État américain Antony Blinken se sont également exprimés suite au séisme. D'après le premier, le président Biden a chargé l'agence des États-Unis pour le développement international (USAID) et d'autres partenaires du gouvernement fédéral à "évaluer les options de réaction des États-Unis afin d'aider les plus touchés". De son côté, Antony Blinken a pointé que les États-Unis examinaient "leurs capacités pour une réaction globale" et maintenaient un "contact étroit avec les alliés turcs" afin de "déterminer ce dont la région a besoin".
Le secrétaire de l'Otan Jens Stoltenberg a mis l'accent sur la nécessité d'actionner les mécanismes otanien de réaction collective aux situations de crise en appelant à aider l'allié en détresse. "Solidarité totale avec le membre de l'Otan, la Türkiye, après le terrible tremblement de terre d'hier. Je suis en contact avec le président Erdogan et le ministre turc des Affaires étrangères Mevlüt Çavusoglu, les alliés de l'Otan sont prêts à venir en aide", a-t-il écrit sur Twitter.
L'UE et certains de ses membres à part intensifient également leurs contacts avec la Türkiye, malgré le conflit qui prenait de l'ampleur en début d'année avec Ankara et le président Erdogan. Mais le séisme a radicalement changé la situation dans les relations entre la Türkiye et l'UE, qui étaient pratiquement ennemies en fin de semaine dernière.
Après les affirmations de solidarité avec la Türkiye du chef du Conseil européen Charles Michel et du chef de la diplomatie européenne Josep Borrell, le porte-parole de la Commission européenne Balazs Ujvari a annoncé que 13 pays européens avaient proposé leur aide à la Türkiye pour les opérations de secours.
"La Türkiye a activé le mécanisme de protection civile de l'UE, qui a immédiatement réagi. Nous avons mobilisé 10 équipes de recherche et de sauvetage de Bulgarie, de Croatie, de République tchèque, de France, de Grèce, de Hongrie, de Malte, des Pays-Bas, de Pologne et de Roumanie. L'Italie, l'Espagne et la Slovaquie ont également proposé leurs équipes de sauvetage", a annoncé Balazs Ujvari.
Parmi les États européens réagissant activement au séisme turc se trouvent la Suède et la Finlande, les deux pays à avoir le plus de difficultés avec Ankara qui a refusé d'approuver leur adhésion à l'Otan.
La Suède, où encore récemment un mannequin du président Erdogan était pendu en public et le Coran était brûlé, en tant que pays président du Conseil de l'UE, a convoqué une réunion du dispositif de gestion de crise de l'UE (IPCR) afin de coordonner les mesures de soutien en réponse au séisme en coopération étroite avec la Commission européenne.
Helsinki s'est également montré actif. "La Finlande envoie des experts afin d'aider la Türkiye à mener les opérations de sauvetage. De plus, nous comptons envoyer de l'aide humanitaire dans les régions touchées. Le préjudice du séisme est immense", a déclaré la ministre finlandaise de l'Intérieur Krista Mikkonen.
Le même jour, le journal finlandais Iltalehti a annoncé que la Finlande pourrait renoncer à sa condition antérieure de rejoindre l'Otan avec la Suède en acceptant de le faire séparément, si Ankara ratifiait seulement la demande finlandaise.
Pour sa part, le premier ministre suédois Ulf Kristersson en visite en Estonie a annoncé que son pays était prêt à relancer les négociations avec la Türkiye sur l'adhésion à l'Otan dès qu'Ankara serait prêt à le faire.
"La première chose que nous devons faire, c'est calmer la situation. Il est difficile de bien discuter quand littéralement tout brûle autour. Calmons-nous, prenons en compte les notions de sécurité et revenons à la table des négociations. je pense qu'il existe de bonnes prémices à cela", a indiqué Ulf Kristersson lors d'une conférence de presse conjointe avec son homologue estonienne Kaja Kallas.
Par ailleurs, la détente qui se profile dans les relations turco-occidentales pendant la lutte contre les conséquences du séisme pourrait précisément créer les "bonnes prémices" pour que l'épopée avec l'approbation des demandes de la Suède et la Finlande se solde par une fin heureuse inattendue au sommet de l'Otan cet été à Bruxelles.
Alexandre Lemoine
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