18.01.2024
Le vice-ministre polonais des Affaires étrangères, Andrzej Szeina, dans un entretien au quotidien Rzeczpospolita, a invité les troupes allemandes dans son pays alors que la mémoire de l’occupation allemande en Pologne durant la Seconde Guerre mondiale reste un sujet délicat dans un contexte où l’Allemagne nouvelle a des visées sur ses anciens territoires du Reich.
Donald Tusk, en arrivant au pouvoir en Pologne comme Premier ministre, après avoir écumé diverses fonctions dans les institutions européennes, a manu militari viré les chefs de service et les journalistes des médias publics qui avaient été placés sous le gouvernement PiS. Donald Tusk, le favori et proche de la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, avance à l’unisson avec les positions de Andrzej Szeina qui est membre du parti de la Nouvelle Gauche, un parti social-démocrate, social-libéral, anticlérical, féministe et écologiste.
Les médias polonais du temps du pouvoir PiS avaient signalé que Donald Tusk était un agent des Allemands et, donc, un ennemi de la Pologne. C’est ce que le journaliste de Rzeczpospolita, pose comme question à Andrzej Szeina: «Donald Tusk a-t-il peur que les électeurs pensent que Jarosław Kaczyński avait raison de le qualifier d'agent allemand au Sejm [parlement polonais] et préfère éviter les contacts avec Berlin?». «Nous ne succombons pas au discours agressivement anti-européen de Kaczyński. Il influencera probablement le débat en Pologne pendant un certain temps, mais nous voulons libérer notre pays de l'idée selon laquelle la politique étrangère est censée servir les intérêts politiques d'une formation politique, et non la raison d'État du pays. L'Allemagne est notre partenaire économique le plus important et je pense que cela doit également se refléter dans nos relations politiques. Toutefois, il serait plus avantageux pour la Pologne que cela se produise dans un groupe plus large, avec la France, faisant partie du Triangle de Weimar. Les accusations imprudentes du PiS selon lesquelles nous menons une politique pro-allemande se révéleront alors encore plus absurdes aux yeux des Polonais», a répondu le vice-ministre polonais des Affaires étrangères.
Le quotidien Rzeczpospolita a cité les désaccords entre le président polonais, Andrzej Duda (PiS) et le Premier ministre polonais, Donald Tusk (Plateforme civique) rappelant qu’il y a un problème pour savoir «qui représentera la Pologne en juillet, lors du sommet de l'OTAN à Washington». «Il est clair pour moi que le Premier ministre, Donald Tusk, représentera la République de Pologne dans les réunions internationales les plus importantes. Le Tribunal constitutionnel s'est prononcé il y a de nombreuses années sur la question des arrachages de chaises», a répondu Andrzej Szeina, soulignant, ainsi, que le président polonais actuel compte pour du beurre aux yeux de l’OTAN et de la diplomatie occidentale.
«Après les changements démocratiques, les deux dirigeants [Emmanuel Macron et Olaf Scholz] reconnaîtront Donald Tusk comme un partenaire absolument égal. Dans un an, le 1er janvier 2025, aura lieu la présidence polonaise de l’UE. Cela aura lieu après les élections américaines et la création de la nouvelle Commission européenne», lance Andrzej Szeina, faisant savoir que la période du PiS est finie.
Le journaliste de Rzeczpospolita souhaite savoir de la part du vice-ministre polonais des Affaires étrangères «si la Pologne souhaite que des soldats allemands renforcent le flanc oriental de l'OTAN dans notre pays?». En son temps, Jarosław Kaczyński avait refusé et affirmé qu'«au moins sept générations devaient s'écouler avant qu'un soldat allemand ne mette le pied sur le sol polonais». À, cela le representant de la diplomatie polonaise martèle: «J'ai un avis différent sur cette question et le fait d'être en poste en Lituanie [la Bundeswehr a construit une base permanente dans ce pays à côté du territoire russe de Kaliningrad d’ailleurs revendiquée par certains mouvements politiques allemands comme ancien territoire du Reich] a pour nous une signification similaire. Si le conflit se déroule au-delà de notre frontière orientale, toute aide et coopération de nos alliés est la bienvenue. Alors, si les Allemands veulent renforcer le flanc oriental de l’OTAN en Pologne, comme ils l’ont fait en Lituanie, herzlich willkommen! (répond en allemand Andrzej Szeina)».
Il rajoute: «L’Allemagne n’est pas seulement notre alliée, mais aussi notre amie économique. Jarosław Kaczyński a fait de son agression verbale et diplomatique envers les Allemands un élément majeur du récit de la politique intérieure, tout comme il l'a fait envers les immigrés et la communauté LGBT. Tout le monde était décrit comme plus stupide, pire, dangereux. Pourtant, la politique étrangère doit être efficace, et non tapageuse, dans les dimensions économique et sécuritaire».
Philippe Rosenthal
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